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Juillet 2021

EDITO

L’arrivée de l’été s’accompagne d’une sortie progressive de la crise sanitaire que nous venons de vivre pendant plusieurs
mois. Il était temps. Faut-il pour autant se réjouir de ce retour à la normale ? Incontestablement oui pour nos libertés publiques particulièrement malmenées ces derniers temps !

Nous disposons par ailleurs d’une formidable opportunitépour « renverser la table » et définir collectivement les contours d’un autre monde.

Et pourtant…

Les salariés des premières et deuxièmes lignes sont en situation d’épuisement professionnel sans que cela n’inquiète davantage.

Les salariés bénéficiant de mesures d’accompagnement spécifiques (congé de reclassement, activité partielle…) risquent, faute de trouver rapidement une solution de reclassement, de basculer dans le régime d’Assurance chômage dont le gouvernement veut revoir les conditions de prise en charge à la baisse. Les étudiants vont être confrontés à un marché de l’emploi complexe et dégradés.

Le nombre de places d’accueil à l’hôpital public ne cesse de diminuer, répondant à des politiques de restrictions budgétaires continues dans une gestion néolibérale assumée.

Le gouvernement hésite encore à aborder le dossier de la réforme retraite non pour des raisons « sociales » mais bien plutôt par simple calcul électoraliste. L’urgence écologique passe une nouvelle fois en arrière-plan car il convient de ne pas perturber la reprise de l’activité économique et l’effervescence des marchés. Alors ne baissons pas trop vite la garde car comme chacun le sait, l’hirondelle ne fait effectivement pas le printemps.

 

Nous pourrions toutefois mettre au crédit des petites victoires qui nous ravissent, deux décisions intervenues

récemment. Le 19 mai 2021, le Conseil d’État a considéré que le gouvernement avait outrepassé son habilitation législative en réduisant les délais de consultation et d’expertises des CSE en période de pandémie. Le Conseil d’État a remis en cause de ce fait l’application de l’article 9 de l’ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 ainsi que le décret n° 2020-508 du 2 mai 2020. Par une décision du 22 juin 2021 (n° 452210, 452805, 452839, 452844, 452865, 452886), portant sur la date d’entrée en
vigueur des nouvelles règles de calcul de l’allocation chômage, le Conseil d’État a décidé de la suspension de cette entrée en vigueur prévue initialement au 1er juillet, considérant que les incertitudes sur la situation économique ne permettent pas de mettre en place, à cette date, ces nouvelles règles. Ces décisions en appellent d’autres et nous montre à quel point le combat judiciaire n’est pas vain !

 

Nous vous souhaitons au nom de toute l’équipe d’Atlantes un très bel été.

 

Olivier CADIC / Directeur des activités juridiques et de conseil - Atlantes

DOSSIER SPECIAL

Aujourd’hui, de plus en plus de travailleurs se disent harcelés, les salariés se retrouvent souvent démunis lorsqu’ils sont placés dans ce genre de situation. Que vous soyez encore en poste ou déjà parti de l’entreprise, des solutions existent pour réagir efficacement lorsque vous êtes confrontés à une situation de harcèlement.

 

Qui doit apporter la preuve du harcèlement ?

En matière de harcèlement, la charge de la preuve est partagée entre l’employeur et le salarié en deux étapes :

Première étape : le salarié rapporte des éléments de faits qui laissent supposer l’existence d’un harcèlement.

Deuxième étape : l’employeur doit justifier que ces faits ne sont pas constitutifs de harcèlement mais qu’ils reposent sur des faits objectifs.

Ainsi, un salarié n’a pas à prouver qu’il subit directement du harcèlement mais il doit présenter des éléments susceptibles de justifier d’une telle situation. Par exemple, un salarié peut produire des avertissements qu’il a reçus et qu’il considère illégitimes, il reviendra à l’employeur de les justifier.

Cependant, il est nécessaire en premier lieu que le salarié apporte des éléments de faits, faute de quoi, le juge n’aura pas même à étudier les arguments présentés par l’employeur.

 

Quels sont les moyens de preuve recevables pour justifier de l’existence d’une situation de harcèlement ?

En matière de harcèlement, la preuve est libre. Un salarié peut donc faire état de témoignages écrits de collègues ou d’anciens collègues, de courriels qu’il aurait reçus ou envoyés, de SMS mais également de courriers. Si un salarié est toujours en poste, il est donc conseillé de conserver précieusement toutes preuves qui pourraient être utiles devant un juge.

Il ne faut pas hésiter à noter tous les éléments qui, même s’ils paraissent insignifiants de prime abord, permettent d’apprécier la situation de façon globale.

L’essentiel est de pouvoir présenter un maximum d’éléments factuels puisqu’en matière de harcèlement, c’est l’ensemble
de ces derniers qui sera apprécié pour caractériser l’existence d’une situation de harcèlement.

Ces éléments de preuve doivent permettre de caractériser la dégradation des conditions de travail que le salarié a subi mais également les conséquences que cela a eu sur sa santé d’un point de vue physique ou mental.

 

Quid des enregistrements audio ou vidéo ?

Si la preuve est libre en matière de harcèlement moral, elle doit néanmoins être obtenue de façon loyale pour être recevable devant un Conseil de prud’hommes. Il est donc interdit d’enregistrer quelqu’un à son insu pour prouver l’existence d’un harcèlement.

 

Pour autant, il est peut être difficile de rassembler ces preuves notamment si le harcèlement intervient de façon orale ou en l’absence de témoins. Dans ce cas, des solutions existent avec l’aide de tiers dans l’entreprise mais également en dehors.

 

Le CSE a-t-il un rôle à jouer en matière de harcèlement moral ?

Si un salarié est victime d’une situation de harcèlement, il pourra se tourner vers le CSE pour agir.

Le CSE peut tout d’abord porter auprès de l’employeur la connaissance d’une situation de souffrance au travail via les réclamations individuelles et collectives.

Les élus peuvent également réaliser des visites d’inspection dans tous les services d’une entreprise pour pouvoir étayer par des faits concrets la situation (Combien de salariés sont impactés ? Quels sont les services touchés ?) afin de tenter de trouver une solution à la situation rencontrée.

Un membre du CSE peut également déclencher son droit d’alerte s’il constate des faits de harcèlement. Dans ce cas, l’employeur doit immédiatement lancer une enquête conjointe avec le ou les membres du CSE afin de prendre les mesures adéquates pour cesser cette situation. À l’issue de cette enquête, un rapport devra être établi afin de relater les faits constatés et les solutions qui ont été identifiées. Ce rapport peut évidemment être produit en justice. Si l’employeur ne mène pas l’enquête ou s’il y a divergence sur la réalité des faits, le membre du CSE peut saisir le Conseil de prud’hommes selon une procédure accélérée afin que le juge puisse se prononcer.

Une alerte en cas de danger grave et imminent peut également être activée par le CSE. Dans ce cas, une enquête conjointe doit également être menée et un CSE exceptionnel doit être réuni dans un délai de 24 heures. À défaut d’accord entre l’employeur et le CSE sur les mesures à prendre, l’inspection du travail doit alors être saisie.

Conseil Atlantes « Je ne suis pas prêt à ce que les élus évoquent mon cas en particulier »… Tout d’abord, il faut rappeler que le salarié est protégé contre toute mesure de rétorsion pour avoir subi, refusé de subir ou témoigné des faits de harcèlement. Si malgré cela, il ne souhaite pas que son nom apparaisse, en tant que membre du CSE, vous pouvez évoquer le cas de son service ou de la personne qu’il estime harcelante. Cela pourrait faire réagir votre employeur et si ce n’est pas le cas, le procès-verbal du CSE pourra être un élément intéressant à utiliser dans le cadre d’un contentieux.

 

Une enquête a été lancée, que doit faire le salarié ? 

Si l’enquête concerne une situation personnelle : il sera conseillé au salarié de relater tous les faits qu’il a subi en précisant à chaque fois l’identité d’éventuels témoins, ainsi que les éléments matériels de preuve qu’il pourrait avoir. Le salarié est en droit de refuser une « confrontation » avec la personne qu’il accuse de harcèlement s’il estime que cela pourrait porter préjudice à sa santé.

Si le salarié est convoqué en tant que témoin : s’il s’agit d’une enquête à laquelle l’employeur est partie prenante, il doit s’y rendre et relater les faits dont il a été personnellement témoin.

À la fin de l’enquête, le salarié est en droit de demander à relire ou faire corriger son témoignage. Si le CSE a été associé à celle-ci, le salarié pourra également demander qu’il lui transmette les résultats de l’enquête.

Attention : le salarié ne doit ajouter aucun fait qui ne serait pas avéré. S’il bénéficie d’une protection lorsqu’il témoigne de faits de harcèlement, cette dernière ne trouve plus à s’appliquer en cas de dénonciation de mauvaise foi. Le salarié pourrait même être sanctionné dans ce cas.

 

Quels sont les acteurs externes à l’entreprise qui sont compétents en matière de harcèlement moral ?

 

L’inspection du travail

Avec ou sans l’aide du CSE ou d’un délégué syndical, un salarié peut écrire ou prendre rendez-vous à l’inspection du travail pour relater les faits de harcèlement qu’il subit. Elle peut réaliser ensuite une enquête sur le lieu de travail pour constater elle-même les faits. Dans ce cas, ils doivent protéger l’anonymat du salarié sauf si celui-ci a déjà révélé les faits à son employeur. En tant qu’élu, pensez à leur demander de vous mettre en copie des échanges qu’ils pourraient avoir avec l’employeur pour pouvoir ensuite utiliser ces courriers dans le cadre d’une éventuelle procédure.

 

La médecine du travail

Si un salarié est dans une situation de souffrance au travail, il peut se rendre auprès de la médecine du travail. Si la visite se déroule sur ses horaires de travail, il doit prévenir son employeur de sa visite auprès des services de santé au travail sans pour autant avoir à en justifier la raison.

Pour rappel, tous les échanges qu’un salarié avec le médecin du travail sont couverts par le secret médical, rien ne peut être révélé à l’employeur. Le médecin du travail est le plus compétent pour évaluer l’état de santé et pour préconiser des mesures à l’employeur pour lutter contre les situations de harcèlement au travail. S’il établit des recommandations, l’entreprise est obligée de les suivre.

Le salarié peut également demander à son médecin traitant d’attester de son état de santé, mais celui-ci n’est pas compétent pour faire le lien entre cette dégradation et ses conditions de travail, d’où l’importance de se rendre auprès de la médecine du travail qui peut le faire et noter les faits sur le dossier médical du salarié, dont ce dernier peut avoir copie.

Camille PIAT / Avocate - Atlantes Paris/Île de France

VRAI/FAUX

Durant toute la durée de mon mandat, l’employeur ne peut pas me licencier

 Les membres du CSE sont des salariés protégés, mais cela ne signifie pas que le pouvoir disciplinaire de l’employeur soit exclu. En effet, l’employeur a la possibilité de prononcer une sanction disciplinaire à l’encontre de l’élu dans deux situations : lorsque celui-ci commet un manquement aux obligations de son contrat de travail, ou bien s’il commet un abus dans l’exercice de son mandat. En dehors de ces cas, une sanction disciplinaire infligée à un l’élu est discriminatoire et doit donc être annulée, car elle se rattache à l’exercice du mandat.

À titre d’exemple, doit être annulé le licenciement motivé par des propos tenus par le salarié pendant une réunion commerciale alors qu’il s’exprimait en sa qualité de représentant du personnel pour la défense d’une salariée sanctionnée à la suite d’un différend avec un client (Cass. soc., 11 décembre 2019, n°18-16.713). En revanche, commet un abus dans l’exercice de son mandat justifiant la notification d’un blâme un comportement violent et agressif dans le cadre d’une réunion CSE à l’égard du DRH empêchant de présenter les dossiers à l’ordre du jour (Cass. soc., 2 juillet 2015 n° 14-15.829).

 

Le CSE peut être condamné pénalement

 En tant que personne morale, le CSE peut être poursuivi s’il commet une infraction pénale. Mais si l’infraction a été commise collectivement et que le CSE est poursuivi en tant qu’entité, cela n’empêche pas pour autant la poursuite de chaque membre individuellement.

 

Un membre du CSE peut être individuellement poursuivi s’il détourne des sommes des budgets du comité 

 Dès lors qu’un membre du CSE commet une infraction pénale, il est responsable pénalement. En effet, la responsabilité pénale du CSE n’exclut pas la responsabilité des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits.

Exemples : la Cour de cassation a considéré, à propos d’un trésorier qui avait réglé des dépenses personnelles en utilisant des chèques du comité, que ces agissements ne pouvaient pas justifier un licenciement, le salarié n’étant pas sous la subordination de l’employeur lorsqu’il exerce son mandat. (Cass. soc., 4 juillet 2000, n°97-44.846). Néanmoins, le trésorier pourra être pénalement poursuivi pour abus de confiance car ces faits ont été commis pour son compte ou dans son propre intérêt.

En cas de détournement de son patrimoine, seul le comité au préjudice duquel le délit a été commis aura la possibilité d’agir en justice (Cass. crim., 23 novembre 1992 n° 92-81.499).

En outre, un membre du CSE a également déjà été condamné pour délit d’abus de confiance pour avoir profité à titre personnel des séjours offerts par des agences au comité et avoir fait profiter abusivement de ces voyages à des personnes non bénéficiaires des activités sociales et culturelles du comité (Cass. crim., 7 mars 2012, n°11-82.070).

L’employeur, en revanche, n’a aucun droit à agir, car le détournement n’est pas de nature à causer un préjudice direct à l’entreprise.

Info Atlantes - Un trésorier qui serait poursuivi pour l’infraction d’abus de confiance encourt trois ans d’emprisonnement et 375 000 € d’amende. Des peines complémentaires peuvent s’y ajouter, comme l’interdiction d’exercer en tant que trésorier dans un comité.

 

Je peux être responsable personnellement si je cause un dommage lors de l’exercice de mon mandat 

Si un élu commet une faute dans l’exercice de ses fonctions représentatives, il n’est en principe pas responsable personnellement : c’est la responsabilité collective du comité qui est engagée. Cependant, si la faute individuelle de l’élu ne se rapporte pas à l’exercice normal de ses fonctions représentatives, il est responsable à titre personnel. (Exemple : en cas d’accident de la route survenu pour se rendre à une réunion, c’est l’élu qui sera responsable).

Ainsi, les membres du CSE doivent répondent des faits qui résultent de leur initiative personnelle dès lors qu’ils ne peuvent pas être rattachés à une décision du comité. Dès lors qu’un membre du comité commet une faute excédant les limites de son mandat, sa responsabilité peut être engagée dans les conditions du droit commun (articles 1240 et 1241 du Code civil) dès lors qu’ils ont causé un préjudice par leur faute ou leur négligence à un tiers, celui-ci pouvant être le CSE. De plus, la responsabilité personnelle du membre du CSE peut tout à fait se cumuler avec la responsabilité du CSE dès lors que le membre a, par ses agissements propres, contribué à la commission de la faute et à la réalisation du dommage.

 Lina ABDELALI / Avocate stagiaire

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DANS L’ACTU

Le projet de « loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets », dite loi Climat, est actuellement en discussion au Sénat après avoir été amendée et adoptée par l’Assemblée nationale.

 

Le gouvernement ayant affiché ses ambitions d’accélérer le verdissement de l’économie et d’adapter la gouvernance de l’emploi à la transition écologique, le projet prévoit des dispositions concernant les entreprises et en particulier la représentation du personnel. Cela fait suite à la loi PACTE (Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019) qui impose à toute société d’intégrer dans sa gestion les enjeux sociaux et environnementaux de son activité (nouvel article 1833 du Code civil).

 

La genèse de la loi Climat

Mise en place en octobre 2019, la Convention citoyenne pour le climat avait pour mission d’adresser au gouvernement et au Président de la République « l’ensemble des mesures législatives et réglementaires qu’elle aura jugées nécessaires pour atteindre l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre. » Le projet dit de loi Climat a vocation à retranscrire dans la loi les mesures préconisées par celle-ci.

 

Propositions de la Convention citoyenne sur le CSE

1. Renforcement du rôle des CSE dans la transition bas- carbone des produits et des processus des entreprises :

• Intégrer obligatoirement dans la procédure d’information et de consultation des orientations stratégiques et des politiques sociales de l’entreprise, l’évolution des emplois, des compétences et des formations appropriées liées à la transition bas-carbone (ou réduisant les émissions de gaz à effet de serre) des produits et des processus.

• Créer et généraliser le même type d’instance dans la fonction publique (territoriale, hospitalière et étatique).

2. Renforcement du rôle des CSE dans l’information et la consultation sur le reporting RSE des entreprises :

• Les publications d’entreprise concernant leur politique au regard du climat et les émissions de gaz à effet de serre liées à leurs activités sont généralement intégrées à leur reporting de responsabilité sociétale d’entreprise (RSE). Une obligation serait que le CSE de l’entreprise soit informé et consulté chaque année par la direction de l’entreprise sur le rapport devant être publié par l’entreprise selon les règles définies par le décret no 2017-1265 du 9 août 2017 (relatif à la publication d’informations non financières par certaines grandes entreprises et certains groupes d’entreprises) ;

• […] et que le CSE ait droit à une expertise de ce rapport financée par l’entreprise dans le cadre de cette procédure d’information-consultation.

 

De nouvelles missions pour les CSE ?

 La principale nouveauté du projet est l’ajout de la dimension environnementale aux attributions générales des CSE. Ainsi, l’article L. 2312-8 du Code du travail serait modifié comme suit :« Le comité social et économique a pour mission d’assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise ainsi qu’à la prise en compte de leurs conséquences environnementales, à l’organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production. »

Concrètement, lors de consultations ponctuelles sur les projets d’entreprise, le CSE devra être informé par la direction sur les conséquences environnementales des projets envisagés. De même, dans une approche transversale à l’occasion des trois consultations récurrentes sur la situation financière de l’entreprise, sa politique sociale et ses orientations stratégiques, le CSE devra être informé sur les conséquences environnementales de l’activité de l’entreprise.

Si le projet de loi, dans sa version initiale, avait le mérite d’institutionnaliser de nouvelles prérogatives environnementales au profit des membres du CSE, il ne créait toutefois pas de moyens spécifiques pour leur permettre de mener à bien leur nouvelle mission. Des amendements parlementaires ont permis de combler ces manques de manière marginale.

À noter : Ces avancées sont loin d’être actées puisque la commission du Sénat a proposé de ne pas modifier les attributions des CSE au prétexte « qu’il est prématuré d’élargir (les) missions (des CSE) alors qu’ils peinent encore à se saisir de la plénitude de leurs attributions » et que « les obligations d’information et de consultation créées […] semblent excessives et réalistes. » Cela se traduit effectivement dans le projet de loi modifié par le sénat le 29 juin dernier et qui supprime les prérogatives du CSE en matière environnementale.

Une commission mixte paritaire devrait être réunie pour définir le projet définitif.

De la BDES à la BDESE : l’information des CSE adaptée aux nouveaux enjeux

Pour garantir l’information des représentants, la BDES deviendrait BDESE, soit la base de données économiques, sociales et environnementales, suite à l’adoption d’un amendement. Une nouvelle rubrique, la dixième, est intégrée dans la base mise à disposition des membres du CSE, sur les « conséquences environnementales de l’activité de l’entreprise ». Après l’adoption définitive de la loi, un décret devrait lister les indicateurs susceptibles de figurer dans cette rubrique.

Comme auparavant, le contenu de la BDESE pourrait faire l’objet d’une adaptation dans le cadre d’un accord collectif d’entreprise ou de groupe, permettant de mieux prendre en compte les spécificités de ou des activité(s) de l’entreprise par rapport aux enjeux environnementaux.

 

Formation et expertises : de timides évolutions 

 Pour aider les représentants des salariés à se saisir de ces nouveaux sujets, le projet de loi prévoit que la formation économique des titulaires du CSE et la formation syndicale pourront porter sur les conséquences environnementales de l’activité des entreprises. Ainsi, le « congé de formation économique, sociale et syndicale » devient le « congé de formation économique, sociale, environnementale et syndicale ». On peut déplorer qu’il s’agisse seulement d’élargir des programmes des dispositifs de formations déjà existantes et non de créer des nouveaux droits à formation dédiée aux enjeux environnementaux, comme le prévoyaient des amendements rejetés.

Dans le même ordre d’idée, et sans faire bénéficier le CSE d’une mission spécifique (un amendement ayant là aussi été rejeté), les missions classiques de l’expert-comptable seraient élargies. Ce dernier pourrait analyser les conséquences environnementales de l’activité de l’entreprise lors des trois consultations récurrentes. Les analyses de l’expert réalisées à l’occasion de ces consultations portent ainsi sur les éléments d’ordre environnemental nécessaires à la compréhension des orientations stratégiques de l’entreprise, de sa situation économique et de la politique sociale.

Les amendements en faveur de l’attribution d’heures de délégation supplémentaires permettant aux représentants d’assurer ces nouvelles prérogatives ont tous été rejetés ; de même qu’un amendement prévoyant la création d’une commission dédiée aux questions environnementales ou un droit d’intervention de la CSSCT sur ces sujets.

 

Quid de la place des organisations syndicales et de la négociation ?

À la différence des CSE, le projet de loi Climat ne modifie pas les prérogatives des syndicats, ceux-ci restent tout de même libre de choisir d’inscrire la défense de l’environnement dans leurs statuts.

Le projet de loi ne fait pas de l’environnement un thème particulier des négociations annuelles obligatoires. En revanche, ce thème est intégré à la négociation sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) au niveau de la branche et pour les entreprises disposant d’au moins 300 salariés. Ainsi, il est prévu que les dispositifs de GPEC ont également pour objet de répondre aux enjeux de la transition écologique.

Outre le fait la notion de transition écologique est relativement floue et n’a aucune consistance juridique, rappelons également que, dans très peu d’entreprises, la gestion des emplois est un véritable sujet de négociations partagé entre la direction et les représentants des salariés. L’environnement restera donc toujours un angle mort des négociations pour la plupart d’entre elles.

 

Et demain ? 

Le projet de loi Climat a le mérite d’inscrire les enjeux environnementaux dans l’agenda social des entreprises. Cependant, on ne peut que regretter la timidité des modifications envisagées du Code du travail, au regard de l’importance des enjeux en cause, et d’autant qu’elles sont contestées par le Sénat.

Pour s’assurer que l’urgence écologique et sociale guide les choix de gestion des entreprises, au moins autant que la profitabilité économique à court terme, cela passera nécessairement par la (re)conquête de nouveaux pouvoirs des salariés et de leurs représentants dans les entreprises.

Nous ne manquerons pas de vous tenir informer du contenu définitif de cette loi.

Julien PELTAIS / Juriste - Atlantes Région Ouest

 

Pollution de l’air et santé : le coût pour la société

Les impacts sanitaires liés à la pollution de l’air induisent des coûts pour la société : consultations médicales, achats de médicaments, réduction de l’activité quotidienne (y compris arrêt de travail), hospitalisations, décès prématurés…

… / …

La synthèse de ces travaux amène à chiffrer le coût de la pollution de l’air entre 20 et 30 Md€ (cf. graphique 1) selon l’indicateur retenu. »

Extraits, COMMISSARIAT GÉNÉRAL AU DÉVELOPPEMENT DURABLE Service de l’économie, de l’évaluation et de l’intégration du développement durable www.developpement-durable.gouv.fr n° 175 Octobre 2013

« Avec 48 000 morts par an en France, la pollution de l’air tue plus que l’alcool ». Article paru dans le journal Le monde en date du 27 février 2019

C’est sans compter sur la pollution de l’alimentation et des produits de consommation courante (emballages, mobilier intérieur, téléphone portables, ordinateurs, batteries des véhicules électriques ...). 

Olivier CADIC / Juriste IDF

POIL A GRATTER

Le rapport annuel 2021 de l’association SOS Homophobie révèle que « la part des cas de LGBTIphobies en milieu professionnel est restée stable par rapport aux années précédentes (9 % de l’ensemble [des cas signalés à l’association, soit 125 témoignages sur 1 815]) » . Ce rapport ajoute que « dans le secteur privé comme dans le public, elles sont majoritairement le fait de collègues (49 %) ou de supérieurs hiérarchiques (37 %), bien plus que celui de clients ou d’usagers. Elles se caractérisent par du rejet (63 %), du harcèlement dans près de la moitié des cas (46 %) et des insultes (45 %). Les discriminations relevant du droit du travail concernent près d’un tiers des cas. »

 

Un comportement proscrit par de nombreux textes de loi

 Rappelons au préalable qu’il existe un principe de non-discrimination, édicté à l’article L. 1132-1 du Code du travail, en vertu duquel « aucune personne ne peut ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte […] en raison (notamment) de son orientation sexuelle, de son identité de genre […] ». 

Le Code du travail prévoit également deux interdictions, en vertu desquelles aucun salarié ne doit subir des faits de harcèlement moral (C. trav., L. 1152-2) ou de harcèlement sexuel (C. trav., art. L. 1153-1). Des sanctions civiles, administratives ou pénales peuvent être encourues par leur auteur.

 

Conseil Atlantes - Qu’il s’agisse de situations de harcèlement ou de discrimination, le CSE peut exercer son droit d’alerte sur le sujet.

 

Tout mesure discriminatoire ou fait de harcèlement sexuel ou moral est susceptible de donner lieu à l’exercice par le CSE de son droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes. Notre dossier sur le sujet.

 

Et dans la fonction publique ?

La protection des agents, titulaires comme contractuels, s’inscrit dans le cadre plus général de la lutte contre les discriminations. En la matière, deux normes existent afin de protéger les agents. D’une part, l’article 6 du statut général de la fonction publique pose le principe de non-discrimination. La loi du 27 mai 2008, applicable dans le secteur privé comme dans le secteur public, est venue actualiser ce principe général de non-discrimination en visant, outre l’orientation sexuelle, « l’identité de genre ».

 

Des mesures pour prévenir les LGBTphobies et créer un climat inclusif

Si des mécanismes de sanctions existent, les enjeux de prévention comme d’inclusion demeurent une faculté dont devront s’emparer les entreprises.

Ainsi, en mai 2017, le Défenseur des droits éditait un guide pour « agir contre les discriminations liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre dans l’emploi » afin d’inciter les différents acteurs et actrices de l’emploi. À ce titre, ce guide appelle les
employeurs à mettre en œuvre des actions concrètes et pérennes pour identifier et prévenir les LGBTphobies en établissant un diagnostic, garantissant l’égalité de traitement des personnels LGBT dans le processus RH, en sensibilisant et formant l’ensemble du personnel, en traitant les propos et agissements LGBTphobes, en favorisant le dialogue avec les salariés et leurs représentants, ou encore en accompagnant les personnes transidentitaires.

En matière d’inclusion, à la lecture de ce guide, la première action de l’employeur pourrait être celle de prendre position, en formalisant un engagement. À cet égard, l’entreprise pourrait décider de signer la Charte d’engagement LGBT+ de L’Autre Cercle, laquelle compte 158 signataires au 31 mars 2021 ou de soutenir les normes de conduite de l’ONU.

La deuxième action de l’employeur pourrait être celle de communiquer sur son engagement. Cette communication pourrait, par exemple, prendre la forme d’affiches, de formations présentielles ou en e-learning, d’ateliers, de diffusions de films, de plaquettes ou encore de conférences. À cet égard, Sodexo a créé un Guide de conversation en 2012, pour parler de ce sujet avec les salariés le plus naturellement possible.

 

Conseil Atlantes L’instauration d’un climat inclusif peut constituer une mesure d’amélioration des conditions de travail. Étant rappelé que le CSE peut également susciter toute initiative qu’il estime utile et proposer notamment des actions de prévention en la matière dès lors qu’il est compétent « dans le champ de la santé, de la sécurité et des conditions de travail » (C. trav., art. L. 2312-9).

 Ajoutons enfin qu’une étude devait être menée en 2016 afin de dresser un état des lieux des discriminations anti LGBT au sein de la fonction publique. À ce jour, celle-ci n’a toujours pas été conduite. Par contre, certains d’entre vous ont certainement remarqué la nouvelle campagne contre les discriminations et violences subies par les personnes LGBT+, lancée par le gouvernement depuis le mois de mai 2021, avec pour slogan « Face à l’intolérance, à nous de faire la différence ».

À notre sens, il ne s’agit non pas là de tolérance, car les personnes LGBTQIA+ sont des personnes à part entière qui n’ont donc pas à « être tolérées » par une norme « hétérosexuelle » établie. Il s’agit davantage d’agir en faveur de politiques d’inclusion, notamment destinées à donner de la visibilité et du soutien dans l’entreprise sur ces questions, comme vecteur de changement des mentalités.

(1) lesbienne, gay, bi, trans, queer, intersexes, asexuel et autres

 

Alexandra PANTALACCI / Juriste - Atlantes Paris/Île-de-France

Franck CARPENTIER / Avocat - Atlantes Paris/Île-de-France

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Mise à jour :lundi 18 mars 2024
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