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Novembre 2021

EDITO

Entre l’entrée en vigueur de la réforme de l’assurance chômage et de la loi Climat et résilience, la gestion de l’impact de l’obligation du pass sanitaire dans certaines professions et ses effets sur les contrats de travail, la poursuite ou non du télétravail et la négociation d’un accord sur le sujet, l’augmentation du Smic de 2,2 % (soit 34, 89 euros bruts/mois) depuis le 1er octobre et l’impact de celle-ci sur les rémunérations et les budgets du CSE, l’actualité sociale poursuit sa route de manière inexorable. Ces derniers mois furent d’une rare intensité. Les réunions se sont enchaînées… souvent à distance… loin des autres et du collectif. Un long tunnel sans fin.

Difficile dans ces conditions de prendre des décisions dans l’intérêt du collectif, d’autant que la sortie du « quoi qu’il en coûte » fragilisera certaines entreprises et par voie de conséquence les salariés travaillant dans celles-ci. Il faudra pourtant renouer le contact et resserrer les liens au plus vite.

Difficile par ailleurs de trouver le temps pour se poser afin de faire le bilan de cette première mandature en CSE et commencer à préparer les prochaines élections professionnelles. Le temps viendra où il faudra remettre l’ouvrage sur le métier, afin de chercher des candidat·e·s, songer au futur protocole d’accord préélectoral et repenser la structuration de la représentation du personnel en décidant de conserver en l’état ou non l’accord de CSE ou de dialogue social.

Difficile donc, pour bon nombre d’élu·e·s, de suivre ce rythme effréné, d’autant que la fin de l’année approche et qu’il faut par ailleurs préparer cadeaux, soirées ou autres colis gourmands pour l’ensemble des salariés.

Un moment convivial ? Pourquoi pas après ces mois d’isolement, d’évitement et d’éloignement. Pourtant, à l’heure d’ouvrir les cadeaux que vous aurez patiemment et scrupuleusement sélectionnés pour satisfaire aux souhaits du plus grand nombre, vous en trouverez toujours un ou une pour vous reprocher que « ce n’est pas assez ceci, que c’est vraiment bas de gamme » ou « qu’avec toutes les sommes dont dispose le CSE, vous auriez pu faire beaucoup mieux… »

À tous ces grincheux et grincheuses, vous ne résisterez pas à l’envie de rétorquer : « Si vous n’aimez pas la mer. Si vous n’aimez pas la montagne. Si vous n’aimez pas la ville. Allez-vous faire foutre ! (1)  »

 Bonne lecture à toutes et tous.

 

Olivier CADIC / Directeur des activités juridiques et de conseil - Atlantes

 

(1) Jean-Paul Belmondo [1993-2021] dans « À bout de souffle » de Jean-Luc Godard, 1960. Belmondo qui fut président du syndicat français des acteurs CGT de 1963 à 1966.

ANALYSE ATLANTES


Des dispositions légales au passage à l’acte ou comment s’emparer du nouveau dispositif et impliquer pleinement CSE, organisations syndicales et salariés dans les enjeux climatiques et environnementaux ?

 

La loi contre le dérèglement climatique (1) est récemment entrée en vigueur. Face à l’urgence, la tâche est lourde et chacun doit pouvoir à son niveau s’emparer des questions environnementales pour que ce texte ne constitue pas un nouveau un tigre de papier. Certains soutiennent, à juste titre sans doute, qu’il fallait aller plus loin en fixant des objectifs plus ambitieux et des règles plus contraignantes.

Préférant faire contre mauvaise fortune bon cœur, nous prenons le pari qu’il s’agit d’un début et que d’autres textes plus ambitieux suivront. Celui-ci existe. Faisons le vivre.

 

Des attributions et prérogatives complétées

 

• Aux CSE d’aborder les conséquences environnementales de l’activité de l’entreprise dans les décisions que celle-ci prend en matière économique, financière et sociale, et lors des trois consultations annuelles (orientations stratégiques, situation économique et financière, politique sociale, emploi et conditions de travail).

• Aux organisations syndicales de négocier la mise en place d’un dispositif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, pour répondre notamment aux enjeux de la transition écologique.

• D’enrichir la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE) d’informations portant sur les conséquences environnementales de l’activité de l’entreprise.

• D’étendre la mission de l’expert-comptable aux éléments d’ordre environnemental.

Les angles d’attaque sont multiples et faute de disposer d’un cadre spécifique permettant de s’emparer de ce nouveau champ d’investigation, de nombreux élus risquent d’être effrayés par un tel Everest, d’autant que toute activité humaine est par nature polluante ou destructrice.

Que privilégier ? La qualité… de l’air ? de l’eau ? des sols ? de la nourriture ? de l’habitat ? La santé humaine ? Que faire lorsque l’on travaille dans une structure d’un secteur économique considéré de fait comme structurellement polluant ?

Loin de proposer des solutions clés en main, nous vous suggérons quelques pistes de réflexion pour que chacun fasse sa part à son échelle et dispose d’outils pour s’emparer prochainement de la question de l’impact sur l’environnement de l’activité de l’entreprise dans laquelle il travaille.

 

Un sujet à choix multiples

 

Raisonner sur le produit : Nous savons tous que la fabrication de produits nécessite d’utiliser en petite ou grande quantité des produits « toxiques » (pétrole et ses dérivés aussi bien dans la production industrielle que dans la chaîne alimentaire, pesticides et autres produits polluants dans la filière agroalimentaire). C’est l’un des axes sur lequel le CSE pourrait travailler afin de voir comment réduire ou éliminer la part de ces éléments dans la composition des produits fabriqués. Il ne faut pas hésiter, au nom de la transition écologique, à solliciter l’appui de la Ville, de la Région, de l’État et même de l’Union européenne. Les aides financières peuvent selon les projets s’avérer particulièrement conséquentes. 

Repenser la chaîne de distribution : Il s’agira ici de faire en sorte de privilégier les sociétés de transports ayant fait le choix d’investir dans une flotte de véhicules moderne et moins polluante. Certains prennent par ailleurs la décision de privilégier les circuits courts ou de travailler avec des structures « écoresponsables ».

Changer les habitudes au sein de l’entreprise : C’est sans doute le sujet qui peut paraître le plus facile à aborder. Tous les consommables utilisés à longueur de temps peuvent être passés au peigne fin afin de voir comment substituer un matériau polluant par un autre qui l’est moins, ou en changeant ses habitudes et comportements du quotidien. Une réflexion sur l’isolation ou la rénovation des lieux de travail permettra de réduire l’impact des variations de la température externe sur les conditions de travail et la facture énergétique. Favoriser le télétravail conduira inéluctablement à limiter les transports quotidiens et réduire de ce fait l’empreinte carbone liée à l’activité économique.

Hors les murs : Pourquoi ne pas s’intéresser à tous ces espaces qui bordent les lieux de travail et auxquels nous ne prêtons plus attention ? Les parkings peuvent aisément accueillir des arbres et protéger les voitures du soleil. Les toits et les murs des bâtiments constituent autant de supports capables d’accueillir de la végétation, des panneaux solaires et pourquoi pas des ruches. Les pelouses, uniformes et nécessitant un entretien peu conforme avec la préservation de l’environnement, pourraient également accueillir des potagers ou des herbes folles, et permettre à chacun le temps de la pause venue, de s’adonner au plaisir du jardinage (2)

À l’heure où les transitions collectives s’invitent dans le débat de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et poussent à privilégier les réflexions sur des périmètres régionaux et locaux, il sera aussi question de réfléchir à la mise en commun d’activités : transports, gestion territoriale des emplois et des compétences, restaurants inter-entreprise… C’est aussi une autre façon de lutter durablement contre les délocalisations.

 

Une méthodologie

Le CSE et les organisations syndicales seront en première ligne pour s’emparer de ces sujets et imposer le débat lorsque cela sera nécessaire. Il s’agira de trouver la bonne mesure, déterminer des indicateurs pertinents et fixer des objectifs à la fois ambitieux, réalistes et mesurables. L’expert-comptable sera un atout précieux dans cette démarche inédite.

Pour que celle-ci prenne tout son sens, il conviendra sans doute de réfléchir à la possibilité d’impliquer l’intégralité du collectif de travail. La mise en place de groupes de travail, d’ateliers de réflexion, de chartes de bonnes pratiques ou de cahiers blancs de l’environnement favorisera par ailleurs l’émergence d’une « culture de l’environnement ».

Au demeurant, rien n’interdit de créer une commission du CSE dédiée à ces travaux ou de réfléchir à la mise en place de coordinateurs ou référents environnement.

Chacun pourra procéder par sondages et enquêtes, ou organiser des rencontres avec des personnes impliquées sur ces sujets, de manière à sensibiliser tout un chacun sur l’importance de la situation (4).

Pour conclure : « Une économie en poursuite d’une croissance infinie se retrouve dans la même position que Sisyphe, condamné à pousser son PIB jusqu’à épuisement social (et écologique), et puis à recommencer. (5)  »

La marche est haute, mais l’enjeu mérite que chacun d’entre nous contribue à inverser, à son humble niveau, le sens des choses. Les biens communs constituent le plus petit dénominateur commun qu’il nous reste encore à partager.

À nous citoyens dans l’entreprise de penser à les préserver. Après, il sera trop tard !

 

Olivier CADIC / Directeur des activités juridiques et de conseil - Atlantes

 

(1) Loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets - JORF - 24 août 2021

(2) Pour exemple, les salariés d’un parc d’attraction bénéficient de nombreux espaces vacants du site pour réaliser des activités de jardinage.

(3) Extrait de « Polluants industriels > Salariés en danger » de Jacqueline De Grandmaison - Éditions de l’Atelier - Octobre 2017

(4) À titre purement indicatif : « L’humanité en péril » de Fred Vargas - J’ai Lu - 2020

« L’avenir des simples » de Jean Rouaud - Grasset - 2020

« Petit manuel de résistance contemporaine : récits et stratégies pour transformer le monde » de Cyril Dion - Actes Sud Coll. Domaine du possible - 2018

(5) Thimothée Parrique (docteur en sciences économiques, auteur d’une thèse sur la décroissance « The Political Economy of Degrowth, 2019 » - Journal Le Monde - Édition datée des 26 et 27 septembre 2021

VRAI/FAUX

Contrairement à ce que l’on aurait pu imaginer, le bilan de la négociation collective en 2020 réalisé par le ministère du Travail indique que les partenaires sociaux n’ont pas délaissé les négociations d’entreprise : 77 000 accords d’entreprise ont été signés en 2020, contre 80 780 en 2019.

Qu’il s’agisse d’un dialogue social de gestion de crise (épidémie, activité partielle, télétravail…), ou de la poursuite des obli-gations légales de l’employeur (NAO…), les partenaires ont su adapter leur organisation des négociations depuis cette période atypique, mais les règles de conclusion des accords demeurent, elles, inchangées.

Tous les syndicats représentatifs dans l’entreprise doivent être invités aux négociations

Vrai. Pour qu’un accord soit valablement conclu, tous les syndicats représentatifs, catégoriels comme inter-catégoriels, doivent avoir été invités à participer à sa négociation (Cass. soc. 26 mars 2002, n° 00-17231). Les juges ont eu l’occasion de préciser qu’un syndicat représentatif n’ayant pas désigné de délégué syndical doit tout de même être invité à la négociation (Cass. soc. 8 juillet 2009, n° 08-41507).

Remarque : Cette règle a vocation à s’appliquer également pour la révision d’un accord.

 

La signature « majoritaire » est devenue la règle

VRAI. Depuis la loi dite « Travail » de 2016, pour qu’un accord d’entreprise ou d’établissement soit valable, les syndicats signataires doivent totaliser plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur des syndicats représentatifs au premier tour des
dernières élections des membres du CSE.

Remarque : Si un seul syndicat signataire remplit cette condition, l’accord est valablement signé.

 

Un référendum auprès du personnel peut être demandé par un syndicat, sans conditions 

FAUX. La demande doit provenir de syndicats signataires de l’accord non majoritaires mais réunissant plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur de syndicats représentatifs au premier tour des dernières élections professionnelles.

Ces syndicats ont un mois, à compter de la signature de l’accord, pour produire cette demande. Ils la transmettent dans le même délai aux autres syndicats représentatifs (Code du travail, art. L. 2232-12 et art. D. 2232-6).

 

L’employeur peut, lui aussi, faire valider un accord par le biais d’un référendum 

VRAI. Si, un mois après la signature de l’accord par un ou plusieurs syndicats non majoritaires (entre 30 et 50 %), ces derniers n’ont fait aucune démarche en vue d’un référendum, l’employeur peut l’organiser lui-même, à condition qu’il n’y ait pas d’opposition de l’ensemble des syndicats signataires.

La demande de référendum par les syndicats ou l’initiative de l’employeur entraîne l’ouverture d’un délai de réflexion de huit jours, pendant lequel les syndicats non signataires peuvent revenir sur leur décision et signer l’accord.

Si, à l’issue de ce délai, il n’y a pas eu de nouvelles signatures permettant de dépasser le seuil de 50 %, l’employeur peut organiser la consultation.

Le référendum doit avoir lieu dans un délai de deux mois, à compter de l’expiration du délai de réflexion de huit jours (Code du travail, art. L. 2232-12).

 

Dans le cadre du référendum, la consultation du personnel peut être réalisée entièrement à distance, sous format électronique 

VRAI. Un protocole négocié entre les parties doit fixer les modalités d’organisation de cette consultation (Code du travail,
art. D. 2232-3)
 :

- les modalités d’information des salariés sur le texte de l’accord,

- le lieu, la date et l’heure du scrutin,

- les modalités d’organisation et de déroulement du vote,

- le texte de la question soumise au vote des salariés.

La loi précise que cette consultation peut avoir lieu au scrutin secret sous enveloppe ou par voie électronique (Code du travail, art. D. 2232-2).

 

Les accords dits « catégoriels » n’existent plus 

FAUX. Il est toujours possible de négocier ce type d’accord. Pour mémoire, un accord catégoriel est un accord ne visant qu’une catégorie professionnelle déterminée relevant d’un collège électoral (ex. : les techniciens).

Cet accord obéit aux mêmes conditions de validité que tout accord d’entreprise. En revanche, l’audience électorale des syndicats signataires doit s’apprécier dans le collège concerné (Code du travail, art. L. 2232-13).

 

Anissa CHAGHAL / Juriste - Atlantes Paris/Île de France

 

VRAI/FAUX

L’ordonnance du 17 février 2021 introduit une évolution majeure dans le droit de la fonction publique en accordant, pour la première fois, une place majeure à la négociation collective. Alors que dans ce cadre juridique rénové les premières négociations d’ampleur interviennent, notamment sur le télétravail, nous vous proposons de revenir rapidement sur les principales innovations touchant les accords collectifs dans la fonction publique.

 

Il est possible de conclure des accords collectifs dans la fonction publique.

VRAI. Cette année, la négociation collective a été très largement revalorisée au sein des trois fonctions publiques de telle sorte que directions et organisations syndicales représentatives peuvent s’asseoir autour de la table des négociations sur le même modèle qu’au sein du secteur privé.

 

Tous les accords collectifs régulièrement conclus sont s’imposent à la direction.

FAUX. Seules 14 thématiques, au demeurant très vastes, peuvent donner lieu à la négociation d’un accord collectif juridiquement contraignement pour l’employeur public :

  • Conditions et organisation du travail, notamment actions de prévention dans les domaines de l’hygiène, de la sécurité et de la santé au travail ;
  • Temps de travail, télétravail, la qualité de vie au travail, modalités des déplacements entre le domicile et le travail ainsi qu’impacts de la numérisation sur l’organisation et les conditions de travail ;
  • Accompagnement social des mesures de réorganisation des services ;
  • Mise en œuvre des actions en faveur de la lutte contre le changement climatique, de la préservation des ressources et de l’environnement et de la responsabilité sociale des organisations ;
  • Egalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;
  • Promotion de l’égalité des chances et reconnaissance de la diversité et la prévention des discriminations dans l’accès aux emplois et la gestion des carrières ;
  • Insertion professionnelle, maintien dans l’emploi et l’évolution professionnelle des personnes en situation de handicap ;
  • Déroulement des carrières et la promotion professionnelle ;
  • Apprentissage ;
  • Formation professionnelle et formation tout au long de la vie ;
  • Intéressement collectif et modalités de mise en œuvre de politiques indemnitaires ;
  • Action sociale ;
  • Protection sociale complémentaire ;
  • Evolution des métiers et gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

 

Il est possible de négocier un accord collectif dans des domaines autres que ceux énumérés par l’ordonnance.

VRAI. L’ordonnance prévoit expressément qu’un accord collectif peut intervenir en dehors des 14 thèmes de négociation précités.

Cependant, l’accord qui intervient alors n’est pas contraignant pour la direction : il s’agit alors plutôt d’une forme d’engagement « moral » ou d’un éventuel accord de méthode visant à encadrer une négociation ultérieure.

 

N’importe quelle organisation peut négocier et signer l’accord collectif.

FAUX. Seules les organisations syndicales représentatives peuvent négocier un accord collectif. Précisons que pour être valide, l’accord doit être un accord majoritaire, c’est-à-dire qu’il doit être signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant obtenu au moins 50% des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles au niveau duquel l’accord est négocié.

 

Les organisations syndicales bénéficient de moyens supplémentaires afin de négocier des accords collectifs.

FAUX. En l’état, aucune revalorisation des moyens mis à la disposition des organisations syndicales, en termes de temps ou de formation notamment, n’est envisagée, ce qui laisse planer un risque de déséquilibre entre direction et agents lors des négociations.

 

Les délégués syndicaux bénéficient d’une reconstitution de carrière à l’identique des agents qui n’ont pas exercé de mandat.

FAUX. Les pouvoirs publics ont certes annoncé vouloir prendre en compte la question de la carrière des militants syndicaux afin que soient mis en place des dispositifs susceptibles de permettre l’accompagnement des agents qui se sont investis au profit de la collectivité sans subir de préjudice dans l’avancée de leur parcours professionnel.

Pour autant, nous n’avons en l’état aucune information supplémentaire quant aux mesures envisagées ni quant à l’échéance à laquelle elles seront prises.

Franck CARPENTIER/ Avocat

 

DOSSIER SPECIAL


Au fil des réformes successives, le cadre fixé pour les consultations récurrentes du CSE s’est allégé supprimant tour à tour les échéances mensuelles prévues (loi « Rebsamen » du 17 août 2015) pour finalement ouvrir cette périodicité au-delà de l’année (Ordonnances « Macron » du 22 septembre 2017).

Une discussion avec la direction s’impose donc en cette fin d’année afin de préparer au mieux les travaux du CSE pour 2022. La construction d’un agenda social est le gage d’un bon fonctionnement pour le CSE dans le cadre de ses missions et d’un travail facilité avec l’ensemble des membres, les délégués syndicaux mais également les différents experts du CSE. 

Quelques conseils pour vous aider à construire le vôtre.

 

Les accords relatifs au fonctionnement du CSE dans l’entreprise

 

Depuis le 1er janvier 2016, les consultations récurrentes sont regroupées en trois grands blocs :

- les orientations stratégiques de l’entreprise,

- la situation économique et financière de l’entreprise,

- la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi.

 

Info Atlantes Sous l’égide du CE, cela représentait 17 informations-consultations auxquelles venaient s’ajouter les consultations existantes pour le CHSCT désormais également dévolues au CSE (étant à rappeler que la CSSCT ne peut se voir déléguer la mission de rendre un avis). Cela permet aisément de mesurer la quantité de travail que cela peut représenter. 

 

Un accord collectif d’entreprise majoritaire conclu entre l’employeur et les syndicats représentatifs (sans possibilité de référendum) ou, en l’absence de délégué syndical, un accord entre l’employeur et le CSE adopté à la majorité des membres titulaires, peut notamment définir :

• Le contenu, la périodicité (qui ne peut être supérieure à trois ans) et les modalités des consultations récurrentes du CSE ainsi que la liste et le contenu des informations nécessaires à ces consultations.

• Le nombre de réunions annuelles du comité, qui ne peut être inférieur à six.

• Les niveaux auxquels les consultations sont conduites et, le cas échéant, leur articulation.

• Les délais dans lesquels les avis du comité sont rendus.

Cet accord peut également prévoir la possibilité de regrouper certaines consultations ou certains thèmes de consultation qui pourront également se voir appliquer une périodicité biennale voire triennale.

Ce même accord ou un autre peut comporter des mesures spécifiques relatives :

• À la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE) : organisation, architecture, contenu, modalités de fonctionnement, intégration d’informations ponctuelles ou périodiques ou encore périodicité des informations à mettre à disposition.

• Aux nombre d’expertises. De ce fait, même si toutes ou partie des consultations demeurent annuelles, les exemples d’accord limitant à un rythme de trois ans les expertises ne sont pas rares.

Ces éléments sont cruciaux et à prendre en compte tant au stade de la négociation que lors de la construction de son agenda social.

Ces accords, lorsqu’ils existent, viendront structurer les différents travaux du CSE dans l’année à venir lorsque ces derniers peuvent être anticipés. Faute de disposer d’un accord réglant ces questions, les dispositions dites « supplétives » du Code du travail trouveront à s’appliquer. Elles garantissent dès lors des consultations récurrentes annuellement sur les trois blocs et un droit à expertise maintenu selon cette périodicité, sans pour autant préciser à quel moment dans l’année celles-ci pourront se tenir. 

À noter : Sont également garantis un contenu minimum de la BDESE ainsi que les délais des consultations.

 

La mise en œuvre de l’agenda social : choisir le document pour le sécuriser

 

La mise en œuvre de l’agenda social pour le CSE doit être accompagnée d’une réflexion sur les modalités de sa mise en place.

La mise en place par voie d’accord

Avantage : Un accord peut traiter de la périodicité des consultations. Rien n’interdit donc dans ce type d’accord de préciser les mois, trimestre ou semestre dans lesquels doivent être traitées les consultations du CSE. En outre, dénoncer ce type d’accord implique la mise en œuvre d’un préavis (3 mois) et d’un délai de survie de l’accord (12 mois).

Inconvénient : L’accord implique l’ouverture d’un processus de négociation. Si des accords existent déjà, l’ouverture d’une nouvelle négociation peut être difficile à obtenir auprès de la direction.

La mise en œuvre dans le cadre du règlement intérieur

Avantage : Le règlement intérieur du CSE traite de ses modalités de fonctionnement. Il peut contenir des clauses plus favorables à la loi comme la mise en œuvre d’un agenda social. Cet accord constitue un engagement unilatéral de l’employeur. Faute d’accord, ce dispositif permet de disposer d’engagements à valeur juridique.

Inconvénient : Cet accord constitue un engagement unilatéral de l’employeur qu’il peut dénoncer à l’issue d’un délai
raisonnable et après en avoir informé le CSE. Dénoncer un avantage est donc, dans ce cadre, plus rapide et la procédure moins contraignante pour l’employeur. Cela peut toutefois permettre à l’employeur de s’engager plus facilement.

 

Son contenu, bien plus qu’un simple agenda 

 

Les moments dédiés aux consultations récurrentes du CSE

Ils doivent être convenus au regard des réalités économiques (comme la clôture des comptes), de l’activité, de contraintes organisationnelles et de disponibilité des informations dans la BDES. Pour la construction de cet agenda social, l’expert-comptable du CSE peut vous accompagner.

Certaines consultations peuvent se faire en plusieurs temps, le cas échéant, la remise des informations doit suivre.

Les éventuelles consultations ponctuelles du CSE

Si certains projets nécessitant une consultation du CSE disposent déjà d’échéances, il sera possible de les inclure dans l’agenda social.

Consultation sur le plan de relance (spécifique à 2022)

Les personnes morales de droit privé qui bénéficient des crédits ouverts par la loi de finances pour 2021 au titre de la mission « plan de relance » seront tenues de consulter le CSE sur le montant, la nature et l’utilisation des aides dont ils bénéficient au titre des crédits de la mission « plan de relance » (loi 2020-1721 du 29 décembre 2020, art. 244, I, 4°). Cette consultation interviendrait dans le cadre de la consultation annuelle sur les orientations stratégiques de l’entreprise. Le CSE doit formuler un avis distinct.

Les informations périodiques du CSE

Chaque trimestre, dans les entreprises d’au moins 300 salariés, l’employeur doit informer le CSE notamment sur :

- l’évolution générale des commandes,

- l’exécution des programmes de production,

- les éventuels retards dans le paiement, par l’entreprise, des cotisations de Sécurité sociale,

- l’évolution des effectifs et de la qualification des salariés par sexe (mois par mois).

Les dates des réunions dans l’année ainsi que les réunions spécifiques à la santé

Qu’il s’agisse d’organiser l’activité du CSE ou même l’activité individuelle de chaque salarié, il est opportun de connaître les dates prévues pour les réunions.

Il convient également d’intégrer en tout ou partie les attributions du CSE en matière de santé, sécurité et conditions de travail. Il est impossible que ces dates de réunion ne soient pas fixées à l’avance dans la mesure ou l’employeur doit informer annuellement l’agent de contrôle de l’inspection du travail, le médecin du travail et les agents de la Carsat.

Les négociations à prévoir dans l’année en lien avec les consultations

Sauf si l’entreprise a conclu un accord sur ce sujet, les entreprises doivent négocier :

- tous les ans, sur la rémunération, le temps de travail et le partage de la valeur ajoutée en lien avec la consultation annuelle sur la situation économique,

- tous les ans, sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail en lien avec la consultation annuelle sur politique sociale,

- tous les trois ans, sur la gestion des emplois et des parcours professionnels en lien avec la consultation sur les orientations stratégiques.

À noter : Les dates de remises des informations périodiques dans la BDESE peuvent venir également compléter l’agenda social.

L’agenda social est donc, sous l’égide du CSE, un instrument de structuration des relations sociales plus que jamais nécessaire. Il permet par ailleurs d’anticiper les dates des réunions pleinières et préparatoires du CSE et donc de permettre aux managers de palier au remplacement des élus absents du fait de l’exercice de leurs mandats.

Pour prendre toute son importance il est nécessaire qu’il soit connu de l’ensemble des élus et de leurs partenaires.

 

Maxence DEFRANCE / Juriste - Atlantes Paris/Île de France

DANS L’ACTU

Date d’actualisation 08/11/2021

Le texte définitif, prévoyant notamment la prolongation du pass sanitaire, a été présenté au Conseil des ministres le 13 octobre 2021. Après plusieurs navettes, le 5 novembre 2021, l’Assemblée nationale a définitivement adopté le texte de loi par 118 voix pour et 89 contre.

Ce régime dérogatoire a été mis en place par la loi du 31 mai 2021 pour se terminer, initialement, le 30 septembre 2021. Il a ensuite été prolongé par la loi du 5 août 2021 jusqu’au 15 novembre 2021. Ce texte de loi prévoit, quant à lui, une prolongation jusqu’à une date fixée par décret et au plus tard le 31 juillet 2022.

À noter : Il y a toutefois deux clauses de revoyure en 2022 : le 15 février et le 15 mai où le Parlement se verra présenter un rapport sur les mesures mises en œuvre et aura la possibilité de se prononcer sur le maintien des dispositions.

 

Les différentes mesures du texte

Le texte prévoit donc l’obligation de détenir un pass sanitaire pour tous les lieux et activités prévus par la loi du
5 août 2021. Concrètement, pour les salariés soumis au pass sanitaire, notamment ceux relevant des secteurs d’activité accueillant du public, cela implique la présentation d’un test PCR, auto-test (attention néanmoins en pratique, le gouvernement est réticent sur ce type de test) ou antigénique négatif de moins de 72 heures, un schéma vaccinal complet ou un certificat de rétablissement datant d’au moins 11 jours et de moins de 6 mois (exception pour les salariés ayant une contre-indication médicale reconnue).

 

Autres mesures prévues par le texte :

• Prolongation des mesures en matière d’activité partielle.

• Prolongation des cas des personnes vulnérables ou devant garder leurs enfants.

• Durcissement de la sanction en cas de fraude au pass sanitaire.

 

Dans le détail

 

L’amendement adopté par l’Assemblée nationale

Le pass sanitaire serait applicable jusqu’au 31 juillet 2022 et « aux seules fins de lutter contre la propagation de l’épidémie de covid-19 et si la situation sanitaire le justifie au regard de la circulation virale ou de ses conséquences sur le système de santé, appréciées en tenant compte des indicateurs sanitaires tels que le taux de vaccination, le taux de positivité des tests de dépistage, le taux d’incidence ou le taux de saturation des lits de réanimation. »

Se posent d’ores et déjà certaines questions :

- Quels seraient les taux envisagés ?

- Comment prendre en compte ce taux pour les salariés en déplacement ? Lieu de leur activité normale ou de leur client ?

- Comment prendre en compte ce taux en cas de multi-établissements ? Lieu du siège social ou de l’établissement ?

 

L’avis du Conseil scientifique COVID-19

Nous pouvons également rappeler l’avis du Conseil scientifique Covid-19 du 6 octobre 2021 concernant cette prolongation :  « Le Conseil scientifique considère que les autorités sanitaires doivent conserver dans la durée une capacité juridique à agir en cas de nouvelle vague épidémique durant les prochains mois. Le Conseil scientifique, initialement interpellé par la date du 31 juillet 2022, perçoit finalement la nécessité opérationnelle de cette durée, compte tenu de la persistance des risques potentiels jusqu’à cette échéance et des contraintes du calendrier parlementaire et électoral au cours du premier semestre. Le Conseil scientifique recommande fortement aux autorités sanitaires de mettre en place un cadre juridique fondé sur les principes de réactivité et de proportionnalité. Il doit s’agir de rendre possible la mise en œuvre, à tout moment, de leviers de freinage de l’épidémie mais dans la seule mesure et pour la stricte durée nécessaire que justifie la réalité des risques. Le projet de loi pourrait prévoir que les mesures de vigilance, tel que le pass sanitaire, ne doivent être déclenchées ou prolongées que si la situation sanitaire le justifie et à l’inverse, doivent pouvoir être arrêtées de manière provisoire ou définitive en cas d’évolution favorable. »

À noter : Le Conseil d’État a également été saisi le 29 septembre sur le projet de loi. Il décide que ces dispositions « ne se heurtent à aucune objection d’ordre juridique et n’appellent pas d’observations. » Il convient donc d’attendre la promulgation de la loi et la décision du Conseil Constitutionnel (celui-ci a été saisi le 5 novembre) pour la pleine opérationnalité de cette nouvelle loi. 

 À l’heure où nous bouclons ce numéro, le texte n’a pas fait l’objet d’une publication. Nous mettrons à jour le présent article sur notre site lors de la publication du texte.

 

Audrey LIOTÉ / Juriste - Atlantes Lyon/ Région Auvergne-Rhône-Alpes

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Mise à jour :mercredi 17 avril 2024
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