La défense de l’égalité femmes/hommes demeure une nécessité dans notre société comme dans le monde du travail, terrain privilégié des inégalités puisque s’y joue une grande partie des relations sociales.
Cette précarité liée au genre illustre, d’ailleurs, bien souvent toutes les autres. L’Organisation internationale du travail (OIT), qui prépare sa prochaine convention (la première en 10 ans), ne s’y trompe pas en prévoyant de la consacrer aux violences sexistes et sexuelles au travail.
Notre numéro, sans pouvoir être exhaustif, entend revenir sur l’importance de ces enjeux d’égalité femmes/hommes, et sur la nécessité que les acteurs présents (organisations syndicales, institutions représentatives du personnel, salariés aidés de leurs avocats et experts…), puissent mettre en œuvre les outils existants (loi, accords collectifs…), comme puissent en créer de nouveaux.
A nouveau ici, il faudra pouvoir peser dans le cadre des négociations au sein de l’entreprise tant la route sera encore longue !
N’entendons-nous pas encore que les professions qui se féminisent se dévalorisent… ?
Comment combattre de telles inepties ? En tant qu’homme, je suis heureux de vous annoncer l’ouverture d’ATLANTES MARSEILLE, bureau au sein duquel Laurence CHAZE, avocate, et Hélène DUPERRAY, juriste, seront vos interlocutrices*
Autres nouveautés pour vous servir : l’arrivée d’une application smartphone ATLANTES (Android et iOS) dans les semaines à venir, ainsi que la parution du nouveau guide « CSE et les nouvelles formes de représentations du personnel » à jour des « ordonnances Macron » pour la rentrée de septembre.
Bel été à vous !
Diego Parvex, Avocat Associé
A l’heure où les élections CSE vont être l’occasion de tester en réel le principe de représentation équilibrée F/H dans les listes électorales, qu’en est-il de l’égalité entre les femmes et les hommes au travail ?
Alors même que le principe d’égalité femmes/hommes est gravé dans la Constitution, la France demeure un mauvais élève. Et pourtant les salariés et partenaires sociaux disposent aujourd’hui d’un large arsenal juridique pour assurer son effectivité.
Jusqu’où devrons-nous aller, salariés, syndicats, avocats, élus, pouvoirs publics… pour rendre effective cette égalité ? Devons-nous suivre l’exemple islandais (cf. page 4) ? Comment, vous, représentants du personnel et salariés, pouvez-vous lui donner corps et réalité ? Et le nouveau plan d’action du gouvernement le permettra-t-il ?
Une chose certaine : l’égalité est l’affaire de tous !
Le principe d’égalité femmes-hommes, principe à valeur constitutionnelle, a fait l’objet de multiples lois.
L’inégalité femmes / hommes recouvre différentes réalités et ne se limite pas à la seule question de l’égalité de rémunération :
Les femmes sont ainsi cantonnées dans quelques familles d’emploi : elles représentent 98 % des aides à domicile, aide-ménagères et assistantes, 98 % des secrétaires et 90 % des aides-soignantes 2.
Cf Guide à destination des TPE-PME, Egalité femmes-hommes, mon entreprise s’engage, Laboratoire de l’Egalité
Dans ce cadre, les sanctions peuvent être :
Pénales
Le non-respect de l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes est passible d’une amende de 1 500 € appliquée autant de fois qu’il y a de salariés rémunérés dans des conditions illégales (amende doublée en cas de récidive).
Civiles :
Toutefois, il existe trop peu de jurisprudence et de dossiers, la difficulté étant celle de la preuve.
Toutes les entreprises sont soumises à l’obligation de prendre en compte les objectifs d’égalité professionnelle hommes/femmes et de prévoir des mesures nécessaires pour y parvenir (art. L1142-5 Code trav.).
Analyse de la situation respective des hommes et des femmes pour chacune des catégories professionnelles sur 9 domaines-clés : embauche, formation, promotion professionnelle, qualification, classification, conditions de travail, santé/sécurité, rémunération effective et articulation entre activité professionnelle et vie personnelle. L’analyse doit également porter sur les écarts de salaire et l’évolution du taux de promotion respectifs des femmes et des hommes par métiers dans l’entreprise (art. L2323-8 Code trav.).
Bilan des actions de l’année écoulée, objectifs de progression pour l’année à venir, indicateurs de résultats, actions définies pour les atteindre et échéancier (art. R2323-9 Code trav.).
L’accord ou le plan d’action doit couvrir 3 des 9 domaines d’action pour les entreprises de moins de 300 salariés et 4 domaines d’action pour celles de plus de 300 salariés, la rémunération étant un domaine d’action obligatoire (art. R.2242-2 Code trav.).
Les entreprises qui ne respectent pas cette obligation encourent une pénalité financière pouvant aller jusqu’à 1% de leur masse salariale (art. L.2242-9 Code trav).
L’obligation d’engager une négociation sur l’égalité professionnelle est impérative et se trouve regroupée avec la négociation sur la Qualité de Vie au Travail.
L’accord sur l’égalité professionnelle doit comporter un dispositif de suivi de la mise en œuvre des mesures visant à supprimer les écarts de rémunération et les différences de déroulement de carrière entre les femmes et les hommes (art. L2242-15 Code trav.).
Dans son rapport de 2018, la DARES 6 :
Alors qu’ouvrières et employées (plus de 50% des femmes actives) ont des carrières plafonnées, des bas salaires, des horaires atypiques, une forte pénibilité (TMS), la DARES souligne que les femmes non cadres sont peu visées par les accords. Il en ressortirait un risque d’une « égalité élitiste ».
S’agissant des données chiffrées, 39% des accords ou plans d’action n’en comportent pas y compris pour des données de base (taux de féminisation, écart salarial moyen, rémunération hors primes ou hors dirigeants). La DARES en déduit qu’une appréhension statique et mathématique des écarts ne conduit pas toujours à une réflexion sur les mécanismes de discrimination indirecte sous-jacents et mal-connus.
Face à la persistance des inégalités, le gouvernement a décidé de la mise en œuvre d’un nouveau plan d’action pour l’égalité professionnelle. Deux mesures phares ont été intégrées dans le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » :
En cas d’inégalités constatées, l’entreprise devrait provisionner une enveloppe de rattrapage salarial en faveur des femmes pour résorber les différences discriminatoires. Son montant sera déterminé lors de la négociation collective sur l’égalité professionnelle.
En cas de non-conformité persistante en 2022, la sanction pourra aller jusqu’à 1% de la masse salariale.
La consultation annuelle du CE ou du CSE sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi intègre le thème de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes (art. L2312-36 Code trav.). Aussi, des informations mises à disposition des élus dans ce cadre dans la BDES doivent permettre aux représentants du personnel et à l’employeur d’émettre un diagnostic et de dresser une analyse de la situation respective des femmes et des hommes, par catégories professionnelles, dans les 9 domaines-clés précités (C. trav., art. L. 2312-36).
Le CE doit d’autant plus veiller à ce qu’on lui communique ces informations qu’elles constituent la base sur laquelle les organisations syndicales pourront s’appuyer lors des négociations annuelles.
Que faire si l’employeur refuse de vous transmettre ces indicateurs ? L’Inspection du travail peut intervenir et en dernier recours le tribunal de grande instance. N’hésitez pas non plus à associer les membres de la Commission égalité professionnelle.
On connaissait déjà l’Islande pour la mise en place du congé parental « partagé » : 3 mois pour la mère, 3 mois pour le père, et 3 mois à se partager. Si le père ne prend pas les 3 mois de son congé paternité, aucun des deux parents ne peut prendre les 3 derniers mois.
L’Islande est allée plus loin dans sa quête de l’égalité et a ainsi adopté une loi entrée en vigueur au 1er janvier 2018 obligeant les entreprises de plus de 25 salariés et les administrations à obtenir une certification (renouvelée tous les trois ans) afin de prouver qu’à travail égal, elles versent le même salaire aux hommes et aux femmes. A défaut, l’employeur s’expose à une importante sanction financière. C’est donc sur l’employeur que repose la charge de la preuve consistant à démontrer le respect du principe d’égalité.
Sur le site Atlantes, vous trouverez une interview d’un expert de comités d’entreprise en charge de ces thèmes.
Laurence Chaze, Avocat Bureau ATLANTES de Marseille / Helène DUPERRAY, Juriste Bureau ATLANTES de Marseille
1 Source : Insee, DADS 2014, Salaires dans le secteur privé selon le sexe et la catégorie socioprofessionnelle en 2013
2 Source : Insee, enquête Emploi 2014 et retraitement Dares / Champ : France métropolitaine
3 Sources : Insee, 2012 et Observatoire des inégalités, 2009
4 Source : Dares, 2013
5 Source : Cese, 2013
6 « L’égalité professionnelle est-elle négociable ? Enquête sur la qualité et la mise en œuvre d’accords et de plans égalité femmes-hommes élaborés en 2014 et 2015 »
Le code du travail confère au délégué syndical le monopole de la négociation des accords collectifs (art. L.2232-12 du Code du travail). Ce n’est qu’en son absence que la loi organise les modalités de la négociation dite "dérogatoire" (art. L.2232-21 Code trav.).
EXEMPLE : Les résultats des élections professionnelles sont les suivants : L’OS n°1 représente 53% des suffrages exprimés ; l’OS n°2, 32% ; l’OS n°3, 11% ; l’OS n°4, 4%.
Il y a donc trois organisations syndicales représentatives dans l’entreprise : l’OS n°1, l’OS n°2 et l’OS n°3. L’OS n°4, n’ayant pas atteint le seuil des 10% lui permettant d’être représentatif, ne pourra pas désigner le délégué syndical.
Pour qu’un accord d’entreprise soit valide, plusieurs hypothèses :
Si l’OS n°3 est la seule signataire de l’accord, elle ne pourra pas demander l’organisation d’un référendum, elle doit réussir à convaincre l’une des deux autres OS.
En cas de Conseil d’entreprise, deux conditions de validité alternatives (art. L2321-9) :
Alison VILLIERS, Juriste.
Afin d’assurer la bonne marche de l’entreprise et de comptabiliser les heures de délégation, le représentant du personnel doit informer la direction de la prise de ses heures en respectant, dans la mesure du possible, un délai de prévenance (Cass. soc., 18 janv. 1961, n° 59-40.536).
Oui, en principe les arrêts de travail ne suspendent pas l’exécution du mandat (Cass. crim., 16 juin 1970, n°69-93.132). Un arrêt a par exemple considéré que les heures de délégation prises pendant un arrêt maladie ne pouvaient être rémunérées que si elles avaient été autorisées par le médecin traitant (Cass. ch. Mixte 21mars 2014, n°12.20.002). Mais attention, il convient de faire preuve d’un maximum de vigilance à ce sujet.
Le principe selon lequel le temps passé en réunion de comité ne s’impute pas sur le crédit d’heures s’applique également au temps de déplacement nécessaire pour se rendre aux réunions plénières.
Ce temps de trajet pour se rendre aux réunions plénières, lorsqu’il est pris en dehors de l’horaire normal de travail doit être rémunéré comme du temps de travail effectif uniquement pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail (Cass. soc., 12 juin 2013, n° 12-12.806). Ce temps ne doit donc pas s’imputer sur les heures de délégation.
Il est possible de prendre ses heures de délégation aussi bien pendant les heures de travail qu’en dehors de ces heures. Il est d’ailleurs indispensable pour les salariés travaillant de nuit de pouvoir prendre leurs heures de délégation en journée (Cass. soc., 11 juin 2008, n° 07-40.823) et inversement.
Dans cette hypothèse, dans la mesure où cela conduit à dépasser le temps de travail du salarié, les heures concernées seront, conformément à la convention collective ou à l’accord collectif applicable au sein de l’entreprise, soit rémunérées avec le taux de majoration applicable, soit ouvriront droit au repos compensateur conformément à la législation applicable aux heures supplémentaires (Cass. soc., 25 juin 2008, n° 06-46.223).
Pour les membres du CE, il existe une règle d’ordre public en vertu de laquelle le crédit d’heure est mensuel et individuel. Il n’est donc pas possible pour eux de mutualiser et de reporter leurs heures.
La possibilité de mutualiser et de reporter les heures de délégation est prévue pour les membres du CSE. Ils peuvent donc mutualiser leurs heures entre titulaires mais aussi avec les membres suppléants sans que cela ne puisse conduire l’un d’eux à disposer, dans le mois, de plus d’une fois et demi le crédit d’heures de délégation dont bénéficie un membre titulaire. Dans ce cas, les membres titulaires de la délégation du personnel du CSE concernés informent l’employeur du nombre d’heures réparties au titre de chaque mois au plus tard huit jours avant la date prévue (art. L. 2315-9 et R. 2315-6 Code du trav.).
NB : le crédit d’heure attribué aux membres du CSE peut aussi être utilisé cumulativement dans la limite de 12 mois mais l’éventuel report ne peut conduire un membre à utiliser dans le mois plus d’une fois et demie le crédit d’heures dont il bénéficie habituellement (art. R. 2315-5 Code du trav.).
Anne-Sophie Larive, Juriste
L’employeur peut apporter des limites à la liberté de se vêtir s’il peut invoquer une raison légitime quant à la tâche à accomplir et si cette limitation est proportionnée au but recherché (C. trav. art. L. 1121-1). A titre d’exemple, les juges ont validé les licenciements de salariés qui portaient bermudas, tongs, jogging, parce alors qu’ils étaient en contact avec la clientèle.
Le contact des salariés avec la clientèle peut relever des nécessités professionnelles justifiant des restrictions en matière vestimentaire. L’employeur peut donc imposer le port de vêtements ou accessoires en particulier en cas de contact avec la clientèle, à condition que cela soit proportionné au but recherché.
A notre connaissance, la Cour de cassation ne s’est encore jamais prononcée sur cette problématique. Toutefois, si le port de chaussures à talons s’avère problématique (exemple : problème médical), nous invitons la salariée à solliciter la médecine du travail, ainsi que les représentants du personnel si nécessaire pour aborder la question avec l’employeur.
Des restrictions peuvent être apportées à la liberté de se vêtir et à la liberté religieuse pour tenir compte des impératifs liés aux contacts avec la clientèle ou en raison d’exigences en matière d’hygiène ou de sécurité.
Ces restrictions doivent impérativement être prévues dans une clause de neutralité dans le règlement intérieur (ou dans une note de service qui devra, dans ce cas, respecter l’ensemble des règles relatives au règlement intérieur). Cette clause doit être générale et indifférenciée (interdiction du port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail) et elle doit viser uniquement les salariés se trouvant en contact avec les clients.
Dès lors que l’employeur impose aux salariés le port d’une tenue de travail pour des raisons de sécurité, d’hygiène et de santé au travail, celui-ci doit prendre en charge les frais d’entretien des tenues. Il est ainsi tenu d’assurer, par des entretiens, réparations et remplacements nécessaires, le bon fonctionnement et le maintien dans un état hygiénique satisfaisant les vêtements de travail qu’il fournit gratuitement (C. trav. art. L. 4122-2 et R. 4323-95).
S’agissant d’autres tenues de travail dont l’employeur imposerait le port (ex. : pour les salariés en contact avec la clientèle), il est tenu de prendre en charge « les frais qu’un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de son employeur, dès lors qu’ils résultent d’une sujétion particulière », et seulement ceux-là (Cass. soc. 3 mai 2016, n° 15-12549 FSPB).
Si d’une part, le port de la tenue de travail est obligatoire, et si d’autre part, l’habillage et le déshabillage doivent se dérouler impérativement dans l’entreprise ou sur le lieu de travail, alors le temps nécessaire aux opérations d’habillage et de déshabillage fait l’objet de contreparties sous forme soit de repos, soit financière (C. trav. art. L. 3121-3).
Ces contreparties peuvent figurer au sein d’une convention collective, d’un accord d’entreprise ou d’un contrat de travail, par exemple.
Anissa CHAGHAL, Juriste
Coordonné par Christelle Dormoy-Rajramanan, Boris Gobille et Erik Neveu
Mai-Juin 68, cinquante ans après… L’événement génère encore beaucoup de discours, de confiscations, de raccourcis, mais qui sait comment cet épisode extraordinaire est entré dans la vie de millions de personnes ordinaires ?
De Paris à Lamotte-Beuvron, en passant par Lille, Marseille ou Poitiers, plus de cent cinquante témoins de ce moment marquant de l’Histoire racontent dans ce livre comment elles et ils l’ont vécu.
Enfant de la banlieue rouge, collégienne des beaux quartiers, étudiant algérien en art dramatique, ajusteur, professeur de collège, opératrice des PTT, métallo d’une usine automobile, appelé du contingent, aumônier de jeunes, mère au foyer, directeur d’une maison de la culture, cheminot… Reliés les uns aux autres, leurs récits forment une incroyable fresque. L’élan émancipateur de ce qui fut vécu durant ces semaines mémorables s’incarne de manière polyphonique, à la fois intime et politique.
29,90 € - 480 pages - disponible en librairie
Renseignements Editions de l’Atelier :
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