Nous avions pu étudier ce nouveau mode de validation des accords lors de la parution de la loi du 8 août dernier et de la publication du décret sur le sujet (voir numéros de septembre 2016/ janvier 2017). Ce dossier est l’occasion de revenir sur le dispositif et de nous interroger sur ses modalités de mise en œuvre.
Le référendum, de l’exception à la règle
Si le recours au référendum n’est pas une idée nouvelle il n’a jamais été la règle. Le Code du travail lui avait laissé une place dans certains domaines comme en matière d’intéressement, de participation ou encore en matière de prévoyance complémentaire. Ce dispositif est également utilisé lorsque les conditions de conclusions habituelles d’un accord ne sont pas réunis (négociation avec le RSS, par un élu du personnel ou un salarié mandaté,...).
Cependant, c’est bien en dehors du cadre légal que le référendum avait pu montrer toute sa dangerosité laissant un goût amer au dispositif chez Smart. Les salariés, mis dos au mur par la direction qui brandissait, entre autre, la fermeture du site, avait majoritairement accepté une augmentation de leur temps de travail. Le chantage était clair dans la question :
« Etes-vous pour le retour aux 39 heures hebdomadaires, payées 37heures, entre 2016 et 2019, en échange du maintien de votre emploi jusqu’en 2020 ? »
Un passage en force lourd de conséquence créant un fossé entre les salariés au forfait jours et les autres, entre organisations syndicales et entre organisations syndicales et salariés.
Ce mode alternatif de validation des accords est généralisé avec la loi Travail. Il n’est plus question d’une mise en œuvre dans certaines hypothèses de négociations mais de l’ouvrir à toutes les négociations.
A quel moment organiser un référendum ?
Pour qu’un accord d’entreprise soit valable, il doit désormais être signé par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueillies plus de 50% des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections.
A défaut, les syndicats signataires ayant recueilli plus de 30% des suffrages qui souhaitent une consultation des salariés par référendum peuvent solliciter l’employeur.
Faute de majorité d’adhésion la loi ouvre donc la possibilité de solliciter les salariés pour valider les accords. L’accord est ensuite validé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.
Le point de vue d’Atlantes
Jean AUROUX affirmait que le référendum équivalait à la mort du fait syndical dès 1982. Et pour cause, la loi offre la possibilité aux organisations syndicales minoritaires de demander une consultation des salariés dont l’organisation matérielle du scrutin qui comprend tant la question qui sera posée aux salariés que la propagande sera négociée entre ces seules organisations et l’employeur. Il ne fait nul doute que l’employeur, désireux sans doute d’imposer des dispositions moins favorables, poussera certains à recourir au référendum.
Ce dispositif supplétif permettant l’adoption d’un accord constitue à nos yeux une forme de chantage pour les organisations syndicales qui, bien que majoritaires, refuseront de signer un accord qui leur apparaîtra ne pas aller dans le sens des salariés : Signez ou prenez le risque d’être désavoué.
Et les salariés dans tout ça ? Consultés en fin de négociation, sans garanties quant aux outils de lecture et de compréhension du texte soumis à leur approbation, on ne peut que douter qu’il s’agisse d’un vote éclairé. Curieuse idée de la culture du dialogue sociale tant clamée ces dernières années.
Le dispositif est-il applicable dès maintenant ?
Le référendum entre en vigueur de façon progressive. S’il est pour l’heure applicable à la négociation des accords de préservation de l’emploi et aux accords portant sur la durée du travail, les repos et les congés, il faudra attendre le 1er septembre 2019 pour que le dispositif soit applicable à l’ensemble des accords.
Cela signifie qu’en attendant cette date, l’ancien dispositif demeure applicable (30% + opposition majoritaire).
La procédure de mise en œuvre du référendum a donné lieu à certaines critiques, pourquoi ?
Pour rappel, les syndicats représentant 30% des suffrages disposerons d’un mois à compter de la signature de l’accord pour indiquer qu’ils souhaitent une consultation. L’employeur disposera ensuite de deux mois pour organiser le scrutin.
La consultation des salariés se déroule dans les modalités prévues par un protocole conclu entre l’employeur et les seules organisations syndicales signataires. Sont donc totalement exclues de cette négociation stratégique, les OS majoritaires et opposées à cet accord.
Par ailleurs, le décret paru sur le sujet fait fi de certaines réalités pratiques et n’apporte aucune garantie. En effet, l’expérience a montré qu’en matière de référendum la communication interne joue un rôle crucial. Pour autant, la direction, nécessairement favorable à l’accord, disposera de l’ensemble des moyens de communication interne.
Quid des organisations syndicales non signataires du protocole ? Pourront-elles utiliser l’intranet de l’entreprise ? Organiser des réunions avec les personnels ?
Ces modalités devraient être suivies avec la plus grande vigilance.
EXIT le bulletin de paie en version papier
La loi dite « Travail » du 8 août 2016 facilite le recours au bulletin de paie en format électronique.
La précédente logique voulait que pour le passage du bulletin papier au bulletin électronique l’accord de chaque salarié soit nécessaire.
Depuis le 1er janvier dernier, la logique est inversée : l’employeur peut avoir recours au bulletin de paie dans sa forme électronique sauf si le salarié si oppose. Le 16 décembre 2016, un décret précisait le dispositif : Un mois avant la première émission ou au moment de l’embauche, l’employeur devra informer le salarié de son droit d’opposition. Il pourra l’exercer quand il le souhaite.
L’employeur doit arrêter les conditions dans lesquelles il assure la disponibilité du bulletin de paie électronique soit pendant 50 ans, soit jusqu’à 75 ans. Les utilisateurs doivent pouvoir récupérer l’intégralité de leurs bulletins de paie émis sous forme électronique. L’employeur doit garantir l’accessibilité du bulletin de paie dans le cadre du service associé au Compte personnel d’activité (sur le sujet, voir notre numéro de février 2017).
par Maxence Defrance, Juriste
Nous avions pu étudier ce nouveau mode de validation des accords lors de la parution de la loi du 8 août dernier et de la publication du décret sur le sujet (voir numéros de septembre 2016/ janvier 2017). Ce dossier est l’occasion de revenir sur le dispositif et de nous interroger sur ses modalités de mise en œuvre.
Le référendum, de l’exception à la règle
Si le recours au référendum n’est pas une idée nouvelle il n’a jamais été la règle. Le Code du travail lui avait laissé une place dans certains domaines comme en matière d’intéressement, de participation ou encore en matière de prévoyance complémentaire. Ce dispositif est également utilisé lorsque les conditions de conclusions habituelles d’un accord ne sont pas réunis (négociation avec le RSS, par un élu du personnel ou un salarié mandaté,...).
Cependant, c’est bien en dehors du cadre légal que le référendum avait pu montrer toute sa dangerosité laissant un goût amer au dispositif chez Smart. Les salariés, mis dos au mur par la direction qui brandissait, entre autre, la fermeture du site, avait majoritairement accepté une augmentation de leur temps de travail. Le chantage était clair dans la question :
« Etes-vous pour le retour aux 39 heures hebdomadaires, payées 37heures, entre 2016 et 2019, en échange du maintien de votre emploi jusqu’en 2020 ? »
Un passage en force lourd de conséquence créant un fossé entre les salariés au forfait jours et les autres, entre organisations syndicales et entre organisations syndicales et salariés.
Ce mode alternatif de validation des accords est généralisé avec la loi Travail. Il n’est plus question d’une mise en œuvre dans certaines hypothèses de négociations mais de l’ouvrir à toutes les négociations.
A quel moment organiser un référendum ?
Pour qu’un accord d’entreprise soit valable, il doit désormais être signé par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueillies plus de 50% des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections.
A défaut, les syndicats signataires ayant recueilli plus de 30% des suffrages qui souhaitent une consultation des salariés par référendum peuvent solliciter l’employeur.
Faute de majorité d’adhésion la loi ouvre donc la possibilité de solliciter les salariés pour valider les accords. L’accord est ensuite validé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.
Le point de vue d’Atlantes
Jean AUROUX affirmait que le référendum équivalait à la mort du fait syndical dès 1982. Et pour cause, la loi offre la possibilité aux organisations syndicales minoritaires de demander une consultation des salariés dont l’organisation matérielle du scrutin qui comprend tant la question qui sera posée aux salariés que la propagande sera négociée entre ces seules organisations et l’employeur. Il ne fait nul doute que l’employeur, désireux sans doute d’imposer des dispositions moins favorables, poussera certains à recourir au référendum.
Ce dispositif supplétif permettant l’adoption d’un accord constitue à nos yeux une forme de chantage pour les organisations syndicales qui, bien que majoritaires, refuseront de signer un accord qui leur apparaîtra ne pas aller dans le sens des salariés : Signez ou prenez le risque d’être désavoué.
Et les salariés dans tout ça ? Consultés en fin de négociation, sans garanties quant aux outils de lecture et de compréhension du texte soumis à leur approbation, on ne peut que douter qu’il s’agisse d’un vote éclairé. Curieuse idée de la culture du dialogue sociale tant clamée ces dernières années.
Le dispositif est-il applicable dès maintenant ?
Le référendum entre en vigueur de façon progressive. S’il est pour l’heure applicable à la négociation des accords de préservation de l’emploi et aux accords portant sur la durée du travail, les repos et les congés, il faudra attendre le 1er septembre 2019 pour que le dispositif soit applicable à l’ensemble des accords.
Cela signifie qu’en attendant cette date, l’ancien dispositif demeure applicable (30% + opposition majoritaire).
La procédure de mise en œuvre du référendum a donné lieu à certaines critiques, pourquoi ?
Pour rappel, les syndicats représentant 30% des suffrages disposerons d’un mois à compter de la signature de l’accord pour indiquer qu’ils souhaitent une consultation. L’employeur disposera ensuite de deux mois pour organiser le scrutin.
La consultation des salariés se déroule dans les modalités prévues par un protocole conclu entre l’employeur et les seules organisations syndicales signataires. Sont donc totalement exclues de cette négociation stratégique, les OS majoritaires et opposées à cet accord.
Par ailleurs, le décret paru sur le sujet fait fi de certaines réalités pratiques et n’apporte aucune garantie. En effet, l’expérience a montré qu’en matière de référendum la communication interne joue un rôle crucial. Pour autant, la direction, nécessairement favorable à l’accord, disposera de l’ensemble des moyens de communication interne.
Quid des organisations syndicales non signataires du protocole ? Pourront-elles utiliser l’intranet de l’entreprise ? Organiser des réunions avec les personnels ?
Ces modalités devraient être suivies avec la plus grande vigilance.
EXIT le bulletin de paie en version papier
La loi dite « Travail » du 8 août 2016 facilite le recours au bulletin de paie en format électronique.
La précédente logique voulait que pour le passage du bulletin papier au bulletin électronique l’accord de chaque salarié soit nécessaire.
Depuis le 1er janvier dernier, la logique est inversée : l’employeur peut avoir recours au bulletin de paie dans sa forme électronique sauf si le salarié si oppose. Le 16 décembre 2016, un décret précisait le dispositif : Un mois avant la première émission ou au moment de l’embauche, l’employeur devra informer le salarié de son droit d’opposition. Il pourra l’exercer quand il le souhaite.
L’employeur doit arrêter les conditions dans lesquelles il assure la disponibilité du bulletin de paie électronique soit pendant 50 ans, soit jusqu’à 75 ans. Les utilisateurs doivent pouvoir récupérer l’intégralité de leurs bulletins de paie émis sous forme électronique. L’employeur doit garantir l’accessibilité du bulletin de paie dans le cadre du service associé au Compte personnel d’activité (sur le sujet, voir notre numéro de février 2017).
par Maxence Defrance, Juriste
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