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La plume de l'alouette
Mai 2019

LE CSE AU FIL DES JOURS
ET DES PRATIQUES
Négocier les prérogatives
des représentants de proximité

 

Soucieux de la centralisation excessive des instances représentatives du personnel, le législateur, dans sa grande mansuétude, invite les acteurs sociaux à négocier la mise en place de représentants de proximité.

Il invite mais n’oblige nullement : pas d’accord, pas de représentant de proximité !

Le Code du travail reste d’ailleurs lapidaire à l’égard de ces représentants du personnel d’un nouveau genre. Aucune règle de fonctionnement, aucune prérogative ne sont précisées par l’article L. 2313-7 : tout devra être défini dans l’accord. Au vu de l’enjeu de la négociation de cet accord, qui fera office de loi des parties, nous vous proposons un retour d’expériences centré sur les prérogatives dévolues aux représentants de proximité.

Porter les réclamations individuelles et collectives des salariés

La grande majorité des accords signés à date assigne aux représentants de proximité la mission historique des délégués du personnel* : « présenter à l’employeur les réclamations individuelles ou collectives relatives aux salaires, à l’application du code du travail et des autres dispositions légales concernant notamment la protection sociale, ainsi que des conventions et accords applicables dans l’entreprise ». Mais les modalités d’exercice de cette prérogative varient fortement d’un accord à l’autre.

Tout d’abord, la délégation accordée par le CSE peut être :

  • Totale : les représentants de proximité traitent les réclamations individuelles et collectives, dans leurs périmètres respectifs, à la place du CSE, qui leur délègue ainsi entièrement cette prérogative.
  • Partielle : les représentants de proximité traitent les réclamations conjointement avec le CSE. Ils se chargent d’un premier traitement local, seules les réclamations non résolues remontent au CSE, par exemple sous la forme d’une note annexée à l’ordre du jour des réunions du CSE.
  • Nulle : les représentants de proximité sont uniquement chargés de collecter les réclamations sur leur site puis de les relayer au CSE qui reste seul habilité à les présenter à la direction.

Ensuite, concernant le processus de traitement des réclamations individuelles et collectives, certains accords reprennent peu ou prou le mode de fonctionnement des délégués du personnel : réunion mensuelle avec la direction locale sur la base des questions transmises au préalable, réponses écrites de la direction transmises 6 jours plus tard, inscription au registre spécial.

D’autres accords s’affranchissent de tout formalisme mais avec le risque que cela laisse les représentants de proximité démunis pour porter effectivement les réclamations, notamment lorsqu’elles seront dérangeantes.

Attention
N’oubliez pas de prévoir les modalités de diffusion des réponses de la direction aux réclamations portées par les représentants de proximité.
Cette étape de retour vers les salariés est primordiale, en complément de la communication régulière des représentants vers les salariés.

Agir localement sur la santé, la sécurité et les conditions de travail

Les attributions santé, sécurité et conditions de travail du CSE et/ou de la commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) sont souvent déléguées aux représentants de proximité dans leurs dimensions locales : « Les RP exercent des attributions en matière de SSCT sur le terrain, au plus près des situations de travail et des salariés de leur établissement. Ils constituent un relais d’informations entre les salariés et leurs représentants en réalisant des missions déléguées par la CSSCT.  » Partenaire de la CSSCT et du CSE, le représentant de proximité est chargé de lui « relayer les signaux faibles identifiés en matière de SSCT : dégradation des conditions de travail, identification des charges de travail excessives, prévention du harcèlement, risques psychosociaux, failles de sécurité ».

Exemples de missions déléguées aux représentants de proximité :

  • Analyser les risques professionnels et transmettre les suggestions des salariés en matière de prévention ;
  • Réaliser les inspections de site et être l’interlocuteur de l’inspecteur du travail et du médecin du travail lors de ces visites ;
  • Mener les enquêtes faisant suite à un accident du travail ou à des incidents répétés ayant révélé un risque grave ;
  • Mener les enquêtes résultant du droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes et du droit d’alerte en cas de danger grave et imminent ;
  • Formuler toute proposition d’actions de prévention du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes ;
  • Instruire les projets de déménagement ou d’aménagement des espaces de travail, notamment dans leurs aspects liés à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail ;
  • Aider les membres du CSE et de la CSSCT sur les questions d’usure professionnelle et d’inaptitude (avis sur les propositions de reclassement).

Il conviendra de veiller à prévoir dans l’accord les modalités de transmission au CSE et/ou à la CSSCT des observations recueillies sur le terrain par les représentants de proximité. Par exemple, en prévoyant que les représentants de proximité ayant réalisé l’une de ces missions spécifiques puissent participer à la réunion de CSE qui traitera du point ou, au minimum, qu’ils puissent échanger avec les élus lors de la réunion préparatoire. Ceci implique de prévoir le temps de délégation nécessaire ainsi que la prise en charge des éventuels temps et frais de déplacement.

Conseil Atlantes
Prévoir des moyens en adéquation avec les prérogatives.

Un constat inquiétant saute aux yeux à la lecture des premiers accords instaurant les représentants de proximité : l’asymétrie entre l’ampleur des missions qui leur sont confiées et l’indigence des moyens qui leur sont accordés. Il est important de veiller à ce que les représentants de proximité bénéficient des moyens nécessaires à l’exercice de leurs prérogatives, d’autant plus que, aucun moyen n’étant prévu par la loi, ils dépendront entièrement de ce qui sera (ou non) négocié dans l’accord.

Petit pense-bête pour négocier les moyens :

  • Des heures de délégation et la possibilité de les reporter d’un mois sur l’autre et de les mutualiser ;
  • La prise en compte du temps passé en réunion et des éventuels temps de déplacement ;
  • Des crédits d’heures supplémentaires pour la réalisation de missions spécifiques (telles les inspections de sites) ;
  • Des droits à formation (formations économique et santé, sécurité et conditions de travail prévues pour les élus du CSE et/ou formations sur mesure par exemple sur l’accompagnement individuel des salariés dans des situations de harcèlement) ;
  • Des moyens d’information et de communication (ordinateur, téléphonie, utilisation de la messagerie professionnelle, panneaux d’affichage…) ;
  • L’accès à la Base de données économiques et sociales ;
  • La liberté de déplacement et de circulation dans l’entreprise ;
  • Un local pour se réunir et recevoir des salariés.

Être le correspondant local du CSE

Le représentant de proximité est souvent considéré comme le relais entre le CSE et les salariés de son périmètre. Ce rôle d’intermédiaire au quotidien peut jouer à double sens :

  • Relayer les informations locales des salariés vers le CSE et intervenir pour toute question nécessitant un traitement local ;
  • Assurer auprès des salariés la communication des délibérations et actions du CSE, notamment, dans la gestion des activités sociales et culturelles.

Plusieurs solutions peuvent être envisagées :

  • Comptes rendus des travaux des représentants de proximité adressés régulièrement au CSE ;
  • Participation périodique des représentants de proximité à toutes ou certaines des réunions préparatoires et/ou plénières du CSE ;
  • Création d’une commission spécifique du CSE regroupant les représentants de proximité ;
  • Désignation d’un représentant de proximité « référent », « secrétaire », « rapporteur », en charge notamment de cette coordination.

Claire BLONDET

Des élections à venir ? Le cabinet Atlantes peut vous accompagner dans les négociations à venir : PAP, périmétre électoral, établissements distincts, moyens alloués au CSE, etc
N’hésitez pas à nous contacter à l’adresse suivante : info@atlantes.fr 

* Actuellement prérogative du CSE définie à l’article L.2312-5 du Code du travail.

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Mise à jour :mercredi 17 avril 2024
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