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La plume de l'alouette
Mai 2017

EXPERTISES CHSCT PRÉVOIR POUR NE PAS SUBIR

La loi du 8 août 2016 (loi El Khomri), a introduit un délai de 15 jours de contestation de l’expertise CHSCT, à compter de la délibération du CHSCT décidant du recours à l’expert (contestation de la nécessité de l’expertise du CHSCT, de la dé­signation de l’expert, du coût prévisionnel, de l’étendue ou du délai de l’expertise).
Au titre de cette saisine du juge par l’employeur, laquelle a vocation à suspendre la réalisation de l’expertise ainsi que la consultation du CHSCT jusqu’à la notification du jugement (C. trav. art. L4614-13), si le juge donne raison à l’employeur, la délibération du CHSCT est annulée et l’expertise n’a pas lieu.

 

Pour mémoire, le CHSCT peut faire appel à un expert agréé dans les cas suivants :

  • lorsqu’un risque grave, révélé ou non par un accident du travail ou une maladie professionnelle ou à caractère professionnel, est constaté dans l’établissement (C. trav. art. L 4614-12, 1°) ;

  • en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (C. trav. art. L4614-12,2°) ;

  • en cas de projet de restructuration ou de compression des effectifs (C. trav. art. L 4614-12-1).

Dans les deux premiers cas de recours, en l’absence de défini­tions légales, toute la difficulté est de déterminer si la situation relève bien d’au moins un des cas de figure.
Le CHSCT doit donc au préalable de sa désignation vérifier que les conditions de cette dernière sont remplies.
Ceci est d’autant plus important qu’en cas de contestation judiciaire par l’employeur, la charge de la preuve de l’existence d’un risque grave ou d’un projet important pèse sur le CHSCT.

NB : contrairement à une idée reçue, il n’existe pas de cas d’expertise pour RPS (risques psychosociaux), cette expertise ne peut être envisagée que parce que le risque psychosocial est grave ou lorsque il relève d’un projet important.

Pour se faire il n’y a pas d’élément déterminant mais un faisceau d’indices qui permettra de s’assurer de la validité du cadre de la désignation de l’expertise.
Ainsi, le risque grave doit notamment être actuel et identifié (Cass. soc. 25-11-2015 n° 14-11.865 FS-PB) et constaté dans l’établissement (Cass. soc. 3-4-2001 n°99-14.002).
Concernant le projet important, le caractère important sera déterminée par la nature et la portée de ses incidences sur les conditions d’hygiène, de sécurité ou de travail (portée du changement).
Nous vous renvoyons ici notamment à l’article paru dansle numéro de mars 2017 de La Plume où nous précisions la question de la preuve en la matière.
De façon récurrente, l’argumentaire développé par les employeurs dans le cadre des contestations d’expertise CHSCT, vise l’inexis­tence du risque grave et/ou du projet important, ou à tout le moins l’absence de démonstration/preuve apportée par le CHSCT. Par ailleurs, l’employeur évoque souvent dans la même logique, des « irrégularités » dans la désignation (absence de point à l’ordre du jour, absence d’explications complètes et pré­cises du CHSCT, absence de réel débat avant vote, absence de désignation valable...).

Il est donc fondamental qu’en amont de la désignation, le CHSCT se prépare.

En résumé, les étapes de la désignation de l’expert CHSCT pourraient être les suivantes :

  • Identification et vérification que les conditions de la désignation de l’expertise sont remplies : existence d’un risque grave et/ou d’un projet important.
  • Il est utile, voire nécessaire, de faire appel à un avocat et/ou à l’expert pressenti, afin qu’il puisse aider le CHSCT à valider les conditions de l’expertise, mais aussi son intérêt, son utilité et donc les différentes étapes ci-après.
  • Inscription à l’ordre du jour de la réunion CHSCT (Cass.soc.22- 1-2008 n°06-18.979) : « Désignation d’un expert en application de l’article 4614-12, 1° ou 4614-12,2° du Code du travail ».
  • Préparation de la résolution portant désignation de l’expert.

La résolution doit être complète. Comporter d’une part, les éléments de démonstration de l’existence du risque grave (quel risque, quelle gravité, nombre de salariés courant le risque.), ou du projet important (quel projet important, en quoi il a des conséquences importantes sur les conditions de travail, d’hygiène ou de sécurité, nombre de salariés impactés...). D’autre part, une mention de la nécessité et de l’utilité du recours à l’expert (en quoi ce travail ne peut être mené à bien par les élus dans le cadre de leurs prérogatives - aspects techniques.). Enfin, les éléments du cadre de la mission de l’expert (ce qui lui est demandé).

NB : attention, en matière d’expertise risque grave, la mission ne peut jamais être celle de déterminer les risques graves, puisque l’existence du risque grave est la condition préalable à l’intervention de l’expert.

par Lise BIANNIC, Juriste
Diego PARVEX, Avocat Associé

 

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