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La plume de l'alouette
56 - Mars 2022

Liberté d’expression en entreprise

« L’entreprise ne peut plus être le lieu du bruit des machines et du silence des hommes ». Nous devons la formule à Jean Auroux, à l’origine des lois de 1982 et notamment du 4 août portant sur « les libertés des travailleurs dans l’entreprise » qui fête cette année ses 40 ans.

Le droit d’expression est une liberté fondamentale qui ne s’arrête pas aux portes de l’entreprise. Elle y joue même un rôle crucial.

Pourtant à l’heure des réseaux sociaux et des messageries professionnelles, les interrogations sont de plus en plus nombreuses. Retour sur les règles qui s’appliquent à cette liberté fondamentale.

La loyauté interdit au salarié 
de critiquer la direction

FAUX. La critique constitue un droit qui découle de la liberté d’expression, sous réserve d’abus. 

En effet, les propos ne doivent pas être injurieux, diffamatoires ou constituer des dénigrements et accusations non fondées (Cass. soc., 16 déc. 2020, no 19-20.394). Cet abus de droit sera apprécié au regard de la publicité qui leur est donnée.

 

Je peux être licencié pour des propos tenus sur les réseaux sociaux, sur mon profil personnel

VRAI. Effectivement, des propos injurieux peuvent constituer une faute justifiant un licenciement même s’ils sont tenus sur un profil personnel. La publicité donnée à cette publication permettra de justifier ou non la faute :

 

Des propos tenus sur
un compte ouvert,
accessibles à tous.

 

Constituent une faute grave justifiant le licenciement.

 

Des propos accessibles exclusivement aux personnes agrées par le salarié
(groupe restreint).

 

Constituent une
conversation privée ne
justifiant pas un licenciement pour faute grave.

 

 

La jurisprudence a déjà considéré qu’un groupe de 14 personnes est suffisamment restreint (Cass. soc. 12 sept. 2018, nº 16-11.690). Une interrogation existe nécessairement sur la constitution de groupes de discussion plus importants et de publications sur des profils réunissant un grand nombre de contacts par exemple.

 

Le droit d’expression est un sujet de négociation

VRAI. Les salariés bénéficient d’un droit d’expression directe et collective sur le contenu, les conditions d’exercice et l’organisation de leur travail.

Chaque salarié doit pouvoir user de ce droit par une démarche personnelle, quelle que soit sa place dans la hiérarchie et sa qualification sans risquer une sanction (article L.2281-1 et suiv. du Code du travail). Les modalités d’exercice du droit d’expression sont définies dans le cadre de la négociation portant sur l’égalité professionnelle et la QVT.

Cette négociation doit avoir lieu au moins une fois tous les 4 ans. Un accord régissant les consultations peut modifier cette périodicité. Notre dossier complet sur la QVT  ICI

 

 Conseil Atlantes - Faute d’accord, l’employeur consulte le CSE sur les modalités d’exercice du droit d’expression des salariés. Même si le Code du travail ne le précise pas, la consultation devrait à notre sens porter sur les mêmes thématiques que celles envisagées pour l’accord.

 

Je peux être sanctionné pour avoir 
dénoncé des faits de harcèlement

FAUX. Le Code du travail précise qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés (article L.1152-2 du Code du travail).

Ainsi, a pu être remis en cause un licenciement intervenu très rapidement après la dénonciation de faits de harcèlement (Cass. Soc., 16 juin 2016, n°14-26.965). Attention, la mauvaise foi du salarié pourra être recherchée par l’employeur. Il devra le cas échéant apporter des éléments. Le seul fait que le harcèlement ne soit pas établi, ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi (Cass. soc., 10 mars 2009, no 07-44.092).

Maxence DEFRANCE/ Juriste IDF

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